Stars Tricks

Premier chapitre
- Confession -

Lionel ne savait pas vraiment ce qu’il faisait là. Enfin, si. Il essayait de faire comme les autres, de se fondre dans la masse tout en se sociabilisant. Il n’était pas très compliqué pour lui d’aller vers les autres. Le plus difficile était de faire semblant qu’il portait un fort intérêt à ses interlocuteurs. Se faire des amis durables n’est pas quelque chose d’anodin pour lui. Ça ne l’était pour personne mais c’était une tâche ardue pour lui plus que pour les autres. Mais même s’il avait envie de solitude, il éprouvait le besoin de s’associer aux autres. Alors, il faisait ce qu’il pouvait et ce soir, il était entré seul dans cette boîte de nuit.

Cela faisait déjà deux heures qu’il était là et la seule personne à laquelle il a parlé, c’était à cette fille à qui il avait marché sur le pied sans le faire exprès. Désormais installé dans un canapé situé au fond de la salle, il regardait les autres s’amuser avec tellement d’alcool dans le sang qu’ils risquaient presque tous le coma éthylique. Et alors qu’il balayait l’endroit des yeux, un visage attira son attention. Un grand brun tout à l’opposé le fixait timidement. L’inconnu détourna d’ailleurs le regard lorsqu’il comprit qu’il avait été démasqué.

Lionel fut intrigué. Pas parce que quelqu’un l’observait, non, mais c’était plutôt l’allure qu’avait ce regard. Ce n’était pas simplement « Je t’ai vu » mais plutôt « je te vois ». Comme si cet inconnu l’avait déjà repéré depuis quelques temps. Et puis, il avait ce sentiment à l’intérieur de lui qu’il ne connaissait que trop bien. Un nouveau chemin s’était dégagé, une nouvelle porte s’était ouverte, il fallait qu’il aille voir de ses propres yeux.
Alors, Lionel se leva de son canapé collant. Il se dirigea vers l’homme à l’opposé, homme qui, dès qu’il le vit, se tétanisa sur place avant de prendre les escaliers menant aux toilettes. Chose surprenante : s’il avait l’air de prendre la fuite, il semblait également s’assurer que Lionel le suivait bien. D’ailleurs, ce dernier crut même apercevoir un bout de sourire sur ses lèvres. Est-ce que l’inconnu était en train de se jouer de lui ? Il n’y avait aucune chance. Lionel le sentait en son cœur : l’homme n’était pas quelqu’un qui lui voulait du mal.

Lorsqu’il passa la porte des toilettes, il n’eut pas le temps de jeter plus d’un coup d’œil avant que la porte ne se referme derrière lui. Il fut ensuite poussé contre le mur avec une certaine douceur dans la brutalité de l’acte, puis ses lèvres furent emprisonnées contre d’autres. Ses paupières se fermèrent automatiquement et il se détendit face au toucher subtil de l’homme. C’était agréable, comme sensation. Ce sentiment d’être désiré, cette chaleur au creux de son ventre, cet appel à la luxure, irrésistible… Lionel avait réellement envie de se lâcher, pour la première fois.

Mais il ne fallait pas. Il mettrait en péril tout le monde de cette manière. Il ne savait pas à quel point ses pouvoirs étaient puissants puisqu’il ne les a jamais laissé sortir, il ne s’était jamais laissé aller. Tous les jours, il avait pensé à eux, les enfermant dans le plus profond de son être pour éviter d’exploser. Il ne devait pas se relâcher maintenant, car il savait toute l’éminence de ses pouvoirs, mais il ne savait pas jusqu’où cette éminence pouvait aller. Il ne connaissait pas la limite. Et pour le moment, il n’avait pas envie de la connaître. Pas dans ce contexte.

A contre-cœur, il repoussa l’homme en gardant les yeux clos. A contre-cœur, oui, parce qu’il adorait ces sensations qu’il lui avait donné. Lionel aurait aimé prolonger ce moment, mais il ne le pouvait tout simplement pas. L’inconnu le laissa faire mais en voyant ses paupières fermées, il tourna la tête vers le miroir : ses propres yeux brillaient.

- Regarde-moi…

Lionel hésita quelques instants. Cette nature, il devait la garder secrète sous peine d’en subir les conséquences. Mais qu’est-ce qu’il se passerait si l’inconnu était de la même race que lui ? Et si, lui aussi, était un magicien ? Il n’eut pas le temps d’hésiter plus longtemps, les mains de l’homme se retrouvèrent sur ses poignets et ceux-ci placés au-dessus de sa tête, il ne se débattit pourtant pas.

- Ouvre les yeux. Tu ne crains rien.

A cet instant, il ne pourrait pas expliquer pourquoi, mais il croyait en ces mots. Dur comme fer, il savait qu’il était en sécurité avec cet inconnu. Alors, Lionel ouvrit les yeux, laissant ainsi apparaître la lueur dorée de son regard. Il le posa sur l’homme, seulement quelques secondes à peine, le temps de réaliser que lui aussi, il était un magicien. Il resta bloqué, plaqué contre le mur, et il eut tout le loisir de contempler son visage. Il n’avait rien de particulier mais Lionel lui trouva un certain charme qui le rendait très agréable à regarder. Surtout lorsque l’inconnu sourit et rougit.

- Tu vois… Je suis comme toi.

L’inconnu essayait toujours de le rassurer. Et ça fonctionnait. Lionel hocha la tête et rougit à son tour, venant tout juste de réaliser qu’il était en train de fixer intensément le jeune homme face à lui. En même temps, il était hypnotisé par son regard brun, couleur miel grâce à la lueur qui signifiait qu’il était un magicien. Il détourna les yeux avant d’avoir un rire léger.

- Quelle soirée…

Soirée surprenante. Déjà parce qu’il était venu en pensant faire des rencontres, que sa soirée s’était déroulée sous le signe de la solitude bien qu’il fut entouré d’un bon nombre d’inconnus, et qu’il avait fini par se faire embrasser dans les toilettes de la boîte, chose qui ne lui était jamais arrivée jusqu’alors. Mais aussi parce qu’il avait rencontré une autre personne de son espèce, chose assez rare, finalement. L’inconnu ne s’était même pas présenté et il ne comptait pas le faire tout de suite. Lionel se surprit à nouveau en plaçant ses bras sur les épaules du magicien face à lui, dans un sourire heureux, et l’autre se rapprocha de lui pour l’embrasser à nouveau.

Non, il ne fallait pas qu’il se laisse aller, mais il aimait tellement ces sensations qu’il ne pouvait pas y résister. Ce n’était qu’un baiser dans des toilettes à l’odeur douteuse mais la chaleur humaine était quelque chose qu’il découvrait à nouveau. Il avait oublié à quel point c’était bon de se sentir ainsi, réchauffé, désiré, aimé d’une certaine manière. Parce qu’il y avait quelque chose entre eux, quelque chose d’indéniable qui les rattachait tous les deux. Peut-être était-ce le fait qu’ils étaient des magiciens ? Peut-être était-ce l’alchimie qu’il y avait eu dès leur premier regard ?

- On devrait aller ailleurs…

L’inconnu regardait désormais Lionel qui resta pendu à ses lèvres pendant un court instant. L’idée de le faire avec lui ne lui déplaisait pas, bien au contraire. Il était dans un état d’euphorie tel que le non restait une idée stupide à ses yeux. S’il fallait se lâcher, alors autant y aller maintenant, et puis, Lionel avait un bon pressentiment.

- Oui… Mais… On va où ?

Parce qu’il ne pouvait décemment pas ramener un inconnu chez lui, surtout avec sa colocataire qui dormait à côté et qui le savait si casanier qu’elle ne s’attendait pas à voir qui que ce soit.

- Euh… Dehors ?
- Tu veux faire ça dehors ?
- Attends, faire quoi ?
- Eh ben… Tu sais, faire l’amour.

Le visage du magicien devint rouge tomate. Il s’écarta de Lionel, sourcils froncés, et évita soigneusement son regard.

- Mais, euh, pourquoi tu voudrais faire l’amour, je veux dire, on ne se connaît pas, tu ne sais même pas mon prénom, enfin…

Visiblement, Lionel avait mal compris et maintenant, c’était lui qui se retrouvait rouge de honte. Il cacha son visage avec ses mains en riant nerveusement.

- Ah… Pardon, mais avec tous ces baisers, je pensais que tu voulais le faire.
- Non, non, désolé. Je…

Sa phrase resta en suspens. En réalité, il hésitait à se dévoiler juste avant de se dire que, de toute façon, la situation ne pouvait pas empirer. Le malaise était déjà à son comble.

- En réalité, je n’ai pas vraiment d’expérience dans ce domaine.

Il s’était trompé. Ses rougeurs sur ses joues devinrent encore plus rouges qu’avant, si bien qu’il les sentait chauffer dans un feu qu’il ne pouvait pas calmer. Mais Lionel eut un regard attendri. Finalement, si l’inconnu l’avait attrapé par surprise et l’avait embrassé sans lui demander son avis, il s’avérait tout de même beaucoup plus innocent qu’il ne le pensait. Et ça le rendait davantage craquant.

- Ouais… Bah, tu sais, je n’en ai pas vraiment non plus. Enfin, je suppose que j’en ai eu plus que toi. Pour être honnête, je ne l’ai fait qu’une fois et ça ne s’est pas très bien passé, alors…
- Ah ouais ? Mais tu tenais à la personne avec qui tu l’as fait ?...

Le magicien semblait insister sur ce fait là. Il avait une vision de la chose très personnelle, faire l’amour était pour lui quelque chose d’intime à partager avec un être cher. Et si, par le passé, Lionel l’aurait contredit, avec cette seule et unique – et désastreuse – expérience qu’il avait en matière de sexe, il ne pouvait qu’être d’accord.

- Pas autant que je le pensais. Disons que j’avais un rapport au sexe très léger alors je ne voyais pas ça très sérieusement. Mais après l’avoir fait, j’ai regretté. Pas seulement parce que c’était particulièrement décevant… Mais aussi parce que je me suis dit que ça aurait été cent fois meilleur avec une personne qui m’aime et qui m’écoute plutôt qu’avec un mec qui n’a pensé qu’à lui…

Un soupir plus tard, il haussa les épaules.

- Enfin, on ne refait pas le passé. Aujourd’hui je suis comme toi, là aussi. Et je te comprends. Et je ne te juge pas.

Son sourire tendre était toujours accroché à ses lèvres et il s’était rapproché du magicien pour lui caresser la joue, comme pour l’apaiser. Ce dernier se calma et lui rendit son sourire en acquiesçant.

- Merci.

Décidément, il y avait une réelle attirance entre eux, parce que le magicien ne lui en voulut pas une seule seconde et lui était même reconnaissant de s’être dévoilé de manière aussi intime à quelqu’un qu’il ne connaissait même pas. Et Lionel se sentait plus léger d’avoir avoué tout ça à quelqu’un, même s’il ne le connaissait pas.

- Je soutiens quand même qu’il faudrait qu’on parte.
- Ouais, y’a une odeur vraiment bizarre.
- Puis y’a plein d’eau partout.
- Euh… C’est pas de l’eau.

Dans un rire de dégoût, les deux sortirent du lieu main dans la main, peu importait si leurs yeux continuaient de briller.

Deuxième chapitre
- Magique -

Ainsi, ils s’étaient retrouvés dehors sans savoir où aller. Le magicien ne s’était toujours pas présenté mais Lionel s’en fichait pas mal. Il partait à l’aventure et avait l’impression de respirer pour la première fois depuis des lustres. L’adrénaline qui courait dans ses veines aidait fortement à garder ces sensations d’euphorie qu’il avait en lui. Il était heureux, il ne savait pas avec qui il partait, mais son cœur lui disait d’y aller quand même, de se jeter dans le vide, de faire le saut de l’ange. C’était le magicien qui guidait leurs pas et ça allait parfaitement à Lionel qui découvrait ainsi sa ville de nuit.

Cependant, il vit qu’ils s’éloignaient d’elle peu à peu. Il se questionna intérieurement, hésitant même à prononcer ses interrogations. Il se ravisa néanmoins : s’il avait fait confiance à cet inconnu dès la première seconde, lâcher maintenant serait mettre fin à l’aventure qui le rendait si vivant. Alors, il continua à marcher près de lui, tenant sa main comme s’il s’agissait de son âme-sœur.

Ils grimpèrent une immense colline et parvinrent au sommet au prix de quelques efforts. Lionel eut beaucoup de mal à la grimper et dût même s’arrêter à deux reprises pour reprendre son souffle. Mais finalement, ça valait le coup. Devant eux s’étendait l’entièreté de la ville. Mais bien plus beau encore : l’espace. Le ciel étoilé les surplombait et ils avaient droit à une vue onirique.

- Wouah… C’est… Magique.

L’inconnu sourit tout en contemplant les étoiles avec cette lueur enfantine dans le regard, tout comme celle qui faisait briller les yeux de Lionel au même instant. Ils restèrent un long moment, debout, à ne rien faire d’autre que de contempler la vue avec une admiration certaine. Les doigts toujours entrelacés, ce fut au bout de quelques minutes que les interrogations de Lionel revinrent.

- Dis… commença-t-il en chuchotant presque, tu ne m’as toujours pas dit comment tu t’appelais.
- Ben, tu ne me l’as toujours pas demandé.
- C’est vrai. Du coup, tu t’appelles comment ?
- Achille.
- Achille…

Lionel avait répété ce nom avec douceur, les yeux rivés dans le ciel, comme s’il cherchait une étoile qui pourrait ressembler à ce prénom et à l’homme qui le portait. Puis, il se retourna vers lui soudainement avec un petit sourire d’enfant.

- Ça ne te dérange pas si je t’appelle Ash ? C’est plus court et plus pratique, même si j’adore Achille.
- Ça dépend. Tu t’appelles comment, toi ?
- Lionel.

Achille se mit à réfléchir quelques secondes, le regard dans le vide, pendant que Lionel scrutait attentivement son expression concentrée qu’il trouva d’ailleurs adorable.

- Tu peux m’appeler Ash, à condition que tu me laisses appeler Lion.
- Lion ? Comme le roi de la savane ? Mais pourquoi ?
- Ben, c’est plus court et plus pratique. En plus, t’as la même crinière.

Lionel pinça les lèvres. Ses cheveux dorés étaient toujours en bataille, comme la crinière d’un lion. Mais c’était parce qu’il n’avait pas envie de les coiffer, le plus souvent. Et il trouvait également que ça lui donnait un côté aventurier, petit sauvageon. Cette coiffure lui plaisait.

- Mouais, d’accord. Lion, ça me va. Même si je n’ai pas vraiment le caractère d’un lion. Je suis plutôt… Comme un furet.
- Un furet ?
- Ouais, un furet. Tu sais, ils sont trop mignons mais en même temps, ils inspirent une certaine crainte, et chez certains même, du dégoût. C’est parce qu’ils peuvent se faufiler partout.
- Tu ne ressembles pas à un furet.
- C’est parce que tu ne me connais pas encore, que tu dis ça.

Ash leva les yeux au ciel dans un sourire amusé. Pour lui, Lion n’avait rien d’un furet. Il était même impressionnant, vu de ses yeux. Il y décelait une grande force intérieure qui pourrait bien surpasser n’importe quel maître. Il le sentait, même s’il ne le connaissait pas. Ash décida de s’installer dans l’herbe, il s’y assit en tailleurs et soupira longuement. Lion fit de même, prenant place à ses côtés. Il ne pouvait détacher son regard de la voie lactée. Il trouvait le ciel si beau, si brillant. Et eux devaient être si petits, insignifiants.

- Tu es de la magie astrale. C’est bien ça ?

Ash posa son regard étonné sur le visage serein de Lion. Il eut un sourire ensuite.

- Comment t’as deviné ?
- Ben, la première chose que t’as fait quand on est sorti de boîte, c’est m’emmener ici. T’as pris les chemins les plus courts et rapides et tu n’as même pas réfléchi en le faisant. J’en déduis que c’est un endroit où tu as l’habitude d’aller, donc que tu aimes, et comme la vue sur le ciel est plutôt bien dégagée et que tes yeux se sont rivés sur les étoiles en premier, c’est plutôt simple de deviner.
- Wouah. Je ne savais pas que tu étais le fils de Sherlock Holmes.
- C’est parce que je ne le suis pas. Faut suivre un peu, je suis un furet.
- Sherlock Holmes est un furet ?!

Le silence fut brisé par leurs rires qui durèrent quelques secondes. Puis, le calme revint.

- Non mais, t’es plutôt doué.
- Merci. A ton tour !
- Mon tour de ?
- De deviner. De quelle magie je suis, à ton avis ?

Ash prit quelques instants à la réflexion. Il l’observa, puis détourna le regard vers les astres pour qu’ils le guident. Enfin, il examina la position de Lion. Il était installé d’une manière si naturelle que ça lui parut alors évident : ses doigts s’enfonçaient dans l’herbe, son corps détendu, ses jambes allongées, le contact de la verdure ne lui faisait pas peur. Les gens ont tous tendance à faire attention à l’herbe et s’installent toujours de manière à ce que peu de leurs vêtements ne touchent le sol. Lui, c’était comme s’il était né dedans. Sa tête penchée en arrière laissait sa chevelure pendre et son regard malicieux donna le sourire à Ash qui avait désormais trouvé sa réponse.

- Magie naturelle.

Lion montra ses dents dans un large sourire, puis il rit.

- Loupé. Magie émotionnelle.

Ash avait du mal à croire qu’il s’était trompé. Il n’était pas fin détective, mais les astres l’avaient guidé vers une réponse qui n’était certainement pas erronée. Lion éclaircit alors la situation.

- Enfin, tu n’es pas totalement à côté. Je maîtrise aussi la magie naturelle, enfin, jusqu’à un certain stade. Pas aussi bien que l’émotionnelle, donc.
- Oh. Ah ! C’est pour ça que tu m’as repoussé tout à l’heure ? Parce que tu ne voulais pas lâcher tes émotions ?
- Ouais.

Lion pinça les lèvres, comme s’il s’agissait d’un sujet tabou. Et c’était en réalité un sujet tendu. Le silence plana à nouveau, mais cette fois, il était lourd. Ash avait la sensation qu’il avait dit une bêtise, alors il se tût comme un enfant qui en aurait fait une dans le dos de ses parents. Ils se contentèrent d’observer les étoiles à nouveau, jusqu’à ce que Lion décide de s’expliquer.

- Je connais la force de mes pouvoirs. Alors, je dois garder une emprise constante sur mes ressentis. Chacun d’eux peut me faire basculer… Ça a failli, tout à l’heure, quand je me suis laissé aller avec toi. Donc au final, ce n’est pas plus mal qu’on n’ait rien fait, enfin, que tu m’aies repoussé.
- Je ne t’ai pas repoussé…
- Oui, non, je me suis mal exprimé. Mais en un sens, tu m’as repoussé, dans le sens gentil de la chose. Tu vois ?
- Hm… Oui, je vois.
- Et tu n’as pas à t’excuser de l’avoir fait.

Lion coupa littéralement la parole à Ash, parce qu’il le sentait venir, ce « je suis désolé ». Et il était même en train de le prononcer quand il l’a arrêté, preuve qu’il avait bien fait de le stopper.

- Tu as bien fait d’arrêter. Le sexe ne devrait pas être juste du sexe… C’est si intime, comme relation. On est mis à nu, aussi bien physiquement que mentalement. Le faire ce soir aurait été une erreur. Tu l’as dit toi-même : on ne sait rien l’un de l’autre.
- Si, moi je sais des trucs.
- Ah ouais ? C’est quoi ?
- Que tu t’appelles Lion, que tu es un furet détective, que tu maîtrises deux magies et que j’aime t’embrasser.

Les yeux doux d’Ash associés à ses paroles firent rougir Lion. Il n’avait pas vraiment l’habitude de se faire draguer de la sorte, mais une chose était sûre : il adorait ça. Alors, il sourit bêtement.

- Moi aussi, j’aime t’embrasser. Quand est-ce qu’on recommence ?

Ash rit, puis il se rapprocha de Lion, prenant son menton entre son pouce et son index, avant de l’embrasser comme il l’avait fait plus tôt. Lion se sentait si bien à cet instant, comme s’il s’envolait. C’était une sensation qu’il n’échangerait pour rien au monde. Il se lâchait sans se lâcher totalement, même si son cœur, lui, battait à tout rompre tant il aimait cet échange.

Ils passèrent la soirée à parler d’eux, à s’embrasser, jusqu’à ce qu’ils se sentent fatigués. Ils s’étaient déplacés jusqu’à avoir le dos collé à un arbre derrière eux. Ash sortit son vieil MP3 de sa poche, il tendit un écouteur à Lion avant de l’allumer. Il appuya sur « play » et Lion se laissa emporter par la mélodie. Something Good d’alt-J passait à l’instant. La tête appuyée sur l’épaule d’Ash, leurs mains enlacées, Lion finit par s’endormir sur les dernières notes de la chanson.

Troisième chapitre
- Parfum -

Ash avait l’habitude de dormir à la belle étoile. Ainsi, il fut le premier à sentir les rayons du soleil lui souhaiter une bonne journée. En ouvrant les yeux, il réalisa que Lion s’était étalé sur ses genoux pour ressentir sa chaleur. Il eut un petit sourire et resta comme ça pendant quelques minutes, juste pour le regarder dormir, en passant ses doigts dans ses cheveux pour lui faire quelques caresses paisibles. C’était certain : cette journée allait être très bonne. Face à lui, la ville se réveillait doucement. Il était tôt dans le matin, alors il ne vit pas grand monde. Mais il put apercevoir les camions poubelles parcourir les rues.

Ash poussa ses écouteurs dans ses oreilles. Il alluma son appareil et choisit sa chanson, la même que celle sur laquelle Lion s’était endormi. Il passa encore quelques minutes sereines, le regard perdu entre l’horizon et le visage angélique de son nouvel ami. Jusqu’à ce que son ventre grogne trop fort pour qu’il puisse l’ignorer.

Il retira son gilet et le roula en boule, puis il le plaça sous la tête de Lion pour qu’il puisse continuer sa nuit. Après s’être dégagé, il partit en direction de la ville, faisant tinter ses pièces de monnaie dans son pantalon. Il était définitivement de bonne humeur et le soleil était avec lui.

Lorsque Lion s’éveilla, il n’ouvrit pas les paupières tout de suite. Le soleil l’avait dérangé pendant au moins une heure, depuis qu’il s’était levé. Étendu dans l’herbe, Lion serra tout ce qu’il trouva près de lui pour plonger dans un meilleur sommeil, à savoir, le gilet d’Ash. L’ombre de l’arbre l’aida à se rendormir, seulement quelques minutes, puis il grommela, mécontent. Après une soirée comme celle qu’il venait de passer, il aurait aimé avoir une grasse matinée pour lui.

Lion finit tout de même par décider de se lever. Il ouvrit alors les yeux, s’installa assis, maintenu par un bras et il se frotta les yeux, l’un après l’autre. Il put ensuite contempler le monde s’agiter tout en bas de la colline. La ville avait eu le temps de se réveiller, mais lui, il venait de le faire seul. Il se demanda où était passé Ash, s’il l’avait abandonné, ne lui laissant qu’un gilet, prouvant alors sa réalité. Parce que Lion eut une pensée, pendant un court instant, une interrogation : et si Ash n’avait été qu’un rêve ?

Ce songe fut brisé par l’existence de ce gilet. Lion était plutôt rassuré de ce fait là. Il se releva et s’étira de tout son long, profitant des rayons du soleil qui lui réchauffait la peau. Il se souvint avoir eu froid cette nuit. Mais il ne s’en inquiéta pas plus que ça, il n’avait pas l’habitude de passer ses nuits dehors, alors il allait forcément avoir froid à dormir à la belle étoile.

Lion surveilla les alentours pendant quelques minutes. Aucun Ash en vue. Il scruta même plus ou moins longuement les pieds de la colline pour l’apercevoir : il n’y vit que l’herbe verte et la terre retournée par les pas des visiteurs. Il soupira longuement, blasé par l’absence de ce nouvel amant qu’il venait de rencontrer, puis il fouilla dans sa poche pour y trouver son téléphone.

Il ne lui restait plus que quelques pourcentages de batterie, il put donc lire l’heure. Mais il grimaça en voyant les messages de sa colocataire qui s’inquiétait de ne pas avoir de nouvelles de lui. Passant une main sur son visage, il dût prendre une décision : s’en aller. Il ne savait pas où était Ash, et l’attendre ici était risqué : il pouvait totalement ne pas revenir, même s’il doutait de ça. Il s’agissait d’un endroit qu’Ash aimait particulièrement.

Pressé par les messages répétés de son amie, Lion quitta la colline pour retourner chez lui, le gilet d’Ash sur le dos. De son côté, Ash remontait la colline par le chemin opposé. Lorsqu’il arriva au sommet, il fut triste de constater l’absence de Lion. Il s’installa là où il se trouvait quelques heures plus tôt dans un soupir désespéré. Pour une fois qu’il faisait la rencontre d’un magicien avec qui ça semblait coller, voilà qu’il avait disparu.

Mais en posant sa main dans l’herbe, il y trouva quelque chose de dur et quelque chose de mou. Lion lui avait laissé son collier ainsi qu’un petit mot rédigé sur un morceau de papier. On aurait dit un bout de carte de visite d’une boutique de parfumerie.

« J’ai ton gilet, tu as mon collier. Comme ça, on est sûrs de se retrouver pour se rendre tout ça.
- xx, le furet détective appelé Lion »

Si Ash était certain qu’il n’avait pas rêvé Lion, il eut tout de même un grand sourire en lisant ces mots. Il fut rassuré qu’il ne soit pas parti sans rien. Il décida alors de porter le collier de Lion et fourra le mot dans sa poche. Il lui sera d’une grande aide, même si les astres l’aideraient également à le retrouver. Au moins, il avait déjà une piste. Ainsi, il prit son petit déjeuner sous l’arbre en contemplant la ville s’agiter tout en bas, la musique caressant ses tympans.

Le lendemain, Lion passa sa journée au travail. Il pensa à Ash bien trop souvent pour se concentrer correctement. Cela dit, son odeur était tellement ancrée en lui qu’il put lui trouver un parfum adéquat. C’était son dada, les parfums. Il était un peu comme la star du magasin parce qu’il arrivait à trouver le bon parfum pour chaque odeur. Ses pouvoirs l’aidaient, évidemment. Chaque émotion ressentie par les autres lui donnaient une idée de ce qu’ils devraient porter pour se sublimer. Et pour Ash, c’était une évidence. Cela dit, il avait tellement envie de trouver quelque chose de parfait qu’il hésita longuement entre deux.

- Bon, Lionel, t’as choisi ? Faut qu’on ferme, là.
- Oui… Pardon. Je vais prendre celui-là.
- Super ! On passe à la caisse et je te l’emballe.

Sa collègue, Emilia, n’avait pas autant de patience que lui. Pour elle, ce n’était qu’un travail de secours en attendant d’avoir fini ses études. Alors, elle était plutôt pressée de partir pour rejoindre son appartement et être enfin tranquille.

- Dis donc, il va être content, le mec avec qui tu sors.
- Hein ? Mais non, c’est pour un ami.
- Un ami, ouais. Bien sûr, je vais te croire !

Elle eut un sourire en coin assez taquin. Elle commençait à bien connaître Lion et elle savait que s’il était entouré, il n’avait pas beaucoup de véritables amis. Pas de ceux à qui il offre un parfum qu’il a pris deux heures à choisir.

- Arrête Emi, tu me connais. Je ne sors pas avec n’importe qui et la semaine dernière, j’étais encore célibataire alors ça ne risque pas de changer de sitôt…

Lion soupira. Quelque part, elle n’avait pas tort. Ash n’était pas qu’un ami. Pour preuve, ils avaient passé la soirée de samedi à s’embrasser plus langoureusement qu’un couple amoureux. Et là, Lion lui achetait un cadeau. A bien y réfléchir, peut-être bien qu’Ash n’était pas qu’un ami pour Lion. Peut-être qu’il était bien plus que ça. Mais Lion ne voulait pas l’admettre.

- Bon, ça te fait soixante-quinze dollars avec la réduc’. Tu devrais te dépêcher, y’a quelqu’un qui a l’air de t’attendre dehors.

Intrigué, Lion tourna la tête vers l’extérieur pour y voir la silhouette d’Ash. Lorsqu’il aperçut son sourire et sa main qui le saluait, Lion se mordit la lèvre et se hâta de régler sa note.

- Merci Emi, on se voit demain !
- Ouais, ne sois pas en retard, cette fois.
- T’inquiète.

Après avoir enfilé sa veste, il poussa la porte pour sortir. Il sourit en s’avançant vers Ash.

- Tu m’as trouvé ! Je ne pensais pas que tu le ferais si vite, je ne t’ai pas laissé beaucoup d’indices.
- Tu m’en as laissé un énorme : la carte de visite du magasin. Et les étoiles m’ont guidé.

Il fallait dire que Lion avait découpé cette carte vite fait, trop pour que le lieu soit complétement effacé. Il eut alors un sourire gêné et passa sa main dans ses cheveux.

- Ah… Ouais, je n’ai pas pu la découper mieux que ça. Mais bon, ce n’est pas pour me déplaire que tu sois là si tôt.
- Tant mieux alors.

Ash détacha le collier qu’il avait porté depuis la veille pour le lui tendre.

- Tiens, c’est à toi.

Lion l’attrapa de ses doigts pour le contempler quelques instants. Il n’avait pas le gilet pour le lui rendre, alors il grimaça, se sentant désolé.

- Ah… Je n’ai pas ton gilet sous la main alors tu devrais le garder. Il est chez moi, si tu veux on y va, en plus ma colocataire n’est pas là jusqu’à demain. Enfin, sans sous-entendu hein !

Il rougit à ces mots. Il était vrai que dit de cette manière, cette invitation pouvait paraître plutôt salace. Elle aurait bien pu gêner Ash, mais à la place, il rit de bon cœur et se rapprocha de Lion avec un regard malicieux.

- M’ouais… Moi je pense que tu veux m’isoler pour pouvoir m’embrasser.
- Mince, mon plan est découvert…
- Ce n’est pas pour autant qu’il ne va pas fonctionner. D’accord pour aller chez toi.

Ash était plutôt content d’y aller, ainsi, il pourrait connaître davantage Lion. Son environnement était le plus important, mais il ne fallait pas qu’il oublie qu’il ne vivait pas seul. La décoration pouvait très bien être aux goûts de sa colocataire sans être aux siens. Mais il y verrait certainement sa chambre pendant la visite.

- Très bien ! Alors allons-y sans plus tarder !

Lion passa son bras sous celui d’Ash et ils se mirent en route vers son chez-lui.

Chapitre 4
- Confort -

- Dis, tu fais quoi dans la vie ?

Lion posa la question à Ash parce qu’il savait désormais que Lion travaillait dans une parfumerie. Mais Lion avait également envie d’en savoir plus sur Ash, connaître son travail, son lieu de prédilection en matière d’occupation, même s’il savait qu’il aimait particulièrement les étoiles.

- Euh… Je… vagabonde.
- Tu vagabondes ?
- Oui.

Lion fut surpris de sa réponse. Il n’avait pas bien compris, il pensait qu’il allait lui répondre « vendeur » ou quelque chose de bien plus commun que ça. Il attendit même des explications qui ne vinrent jamais. Alors, il reprit la parole après un temps de silence.

- Mais ça veut dire quoi, concrètement ? Genre, tu te balades et tu vas où tu veux quand tu veux, c’est ça ?
- Oui, c’est à peu près ça.
- Ah, d’accord ! Mais comment tu payes ton loyer et tout ce qu’il te faut pour vivre ?
- Eh bien, je dors sous les étoiles alors concrètement, je n’ai pas besoin de payer de loyer. Et pour le reste, je fais des petits boulots sur les marchés généralement, parfois sur les ports quand il y en a, et j’ai des amis un peu partout qui m’aident, lavent mon linge, chez qui je peux me laver aussi. Enfin, je me débrouille.

D’habitude, Ash ne prenait même pas la peine de répondre à ce genre de question. Tout simplement parce que les gens avaient tendance à le juger. Il le voyait dans leurs regards, même s’ils ne l’exprimaient pas concrètement. Cela dit, il ne voyait que de l’intérêt dans les yeux de Lion. Alors, ce fut avec plaisir qu’il répondit à ses questions sur le chemin.

- Mais c’est trop bien ! Tu fraudes pour voyager ?
- En général, je marche. Je prends parfois des transports mais je n’aime pas frauder alors je m’arrange pour qu’il y ait une contrepartie équitable.
- Ah, je vois ! T’as traversé le monde entier alors, non ?
- Un peu. Pas autant que j’aurais aimé. Les voyages, c’est un peu fatiguant et je ne voyage pas depuis ma naissance… Enfin, pas depuis que je suis né en tout cas.
- Oh, je vois. C’est pas un peu dur de vivre dehors ?
- Parfois oui… Il y a des moments où je rêve d’être posé dans un lit moelleux avec un chocolat chaud dans les mains, un livre et un feu de cheminée devant moi. Mais c’est un luxe que je ne peux pas me permettre au risque de tomber dans une addiction au confort certaine.
- Pourquoi ?

Lion ne voyait aucune raison à tomber dans cette « addiction ». Pour lui, ce n’en était pas une, c’était plutôt la normalité. Quel mal y avait-il à vivre au chaud et confortablement ?

- Parce que ça nuirait à ma santé.

Alors là, Lion était encore plus paumé qu’avant. Et son expression faciale signifiant l’incompréhension la plus totale fit rire Ash qui se décida, cette fois, à lui donner des explications avant même que Lion n’ait à les demander.

- Les magiciens astraux ne peuvent pas rester à l’intérieur trop longtemps. Ils ont besoin de la lumière des étoiles pour vivre en bonne santé. C’est pour ça que je me sens mieux quand je suis à l’extérieur.
- Mais… Ils ne peuvent pas dormir la journée et passer la nuit dehors ?
- Ce n’est pas une question de journée ou de nuit. Le jour, les astres ne sont pas visibles mais ils sont bien là. En outre, un magicien astral comme moi ne pourra pas alterner comme tu le conseilles parce que ça fonctionnera pendant un petit moment. Mais ensuite, je finirais par avoir un petit rhume qui va se transformer en grippe et mes défenses immunitaires vont baisser jusqu’à disparaître totalement.
- Ah… Vaut mieux éviter alors… Mais on pourrait te soigner ?
- Ce serait compliqué… C’est comme si on privait ton corps d’oxygène pendant très longtemps et qu’on espérait soigner ensuite tes lésions par de l’oxygène.
- Ah, oui, ça semble trop compliqué… C’est dommage.
- Pourquoi ?
- Ben, c’est bien de rentrer chez soi après une longue journée et de s’étendre dans son canapé devant une série.

Ash se mit à trouver Lion adorable. Il avait un peu l’impression d’expliquer certaines choses à un enfant. C’était agréable, de parler avec quelqu’un qui ne porte aucun jugement à son égard, seulement une innocence enfantine apportée par des solutions singulièrement basiques.

- Tu vas quand même pouvoir rester un peu chez moi ?
- Bien sûr. Je ne vais pas rester pendant des jours mais je peux rester aujourd’hui.
- Tu ne tomberas pas malade ?
- Non, ça se passe sur la durée, ça. Il y a des risques que je tombe malade si je viens trop souvent, mais ça peut valoir le coup, avec un hôte pareil.

Le jeu de flirt continuait, Ash ne l’avait pas abandonné. Le sourire de Lion se fit plus grand et il haussa les épaules, remontant le menton, tout fier.

- Tu m’étonnes. T’es un sacré veinard quand même ! Allez, prépare-toi, tu vas entrer dans mon antre.

Lion lui jeta un regard mystérieux et malicieux, il poussa la porte du bâtiment devant lequel ils venaient tout juste de s’arrêter. Ash n’était pas impressionné mais il se prit au jeu rapidement lorsque Lion sortit les clés de sa poche en imitant les magiciens de divertissement.

- Tadaaaaaam… dit-il en ouvrant la porte en grand.

Il laissa entrer Ash en premier, observant la moindre réaction de sa part. Celui-ci entra et regarda tout autour de lui, d’un air faussement impressionné. Son sourire en coin le trahit, mais Lion préféra ne pas y faire attention et continuer ce petit jeu. Il referma la porte et commença à retirer ses chaussures.

- On enlève ses baskets, s’il vous plaît !

Ash s’exécuta avant de retirer sa veste. Il faisait bon dans l’appartement. Il n’avait pas l’air bien grand, mais il était agencé de manière à ce qu’il puisse sembler spacieux dans sa petitesse. La décoration était moderne bien que cosy, accueillante. Les murs n’étaient pas tous blancs, il y avait des touches de couleur. Un beau taupe derrière la grande télévision qui s’imposait sur le petit meuble. La cuisine était ouverte et se trouvait à droite de l’entrée de l’appartement.

- De ce côté, nous avons la cuisine aménagée, le frigo assez spacieux et parfaitement rangé selon l’appartenance des produits et ceux en commun avec Nina, ma colocataire. Et là, tu peux constater la beauté du bouquet choisi par mes soins dans ce fabuleux vase acheté chez Target pour seulement neuf dollars quatre-vingt-quinze !

Lion jouait parfaitement son rôle de présentateur-objet. Il présenta chaque chose avec une petite description tout en bougeant son corps de manière lascive. Ses expressions faciales éloquentes firent rire Ash qui s’amusait comme un petit fou de le voir si bien dans ce rôle.

- Le salon, tout moderne. Le canapé est équipé de somptueux coussins très confortables qui fera frémir ton dos de bonheur ! Le petit plaid plié en carré sur son dos te garantira une chaleur incontestée. Et sur ce grand écran plat, tu peux diffuser en continu la danse des flammes d’un feu de cheminée plus vrai que nature.
- C’est vraiment très tentant, la vie normale.
- C’est parce que j’en fais partie.

Lion tira sa langue en exécutant un petit clin d’œil. Il rit ensuite et se dirigea vers la porte de sa chambre.

- Voilà la pièce tant attendue… Mais avant d’entrer, il va falloir que tu me fasses une promesse…
- Ah ? Laquelle ?
- Tu risques de voir certaines choses… Du coup, si tu pouvais éviter de me juger, ça m’arrangerait. D’accord ?

Si au début de sa phrase, Lion était toujours dans son rôle, il l’avait quitté très rapidement pour redevenir cet enfant inquiet. De nouveau, Ash fut attendri par ses mots et hocha la tête.

- C’est promis, je ne vais pas te juger.
- Yes ! Alors, c’est parti !

Lion ouvrit la porte de sa chambre et entra en premier. Il se posta en plein milieu et croisa les mains derrière son dos, un peu tendu. Sa chambre était un endroit assez intime. C’était son cocon, son refuge. Et Ash put le constater en entrant à la suite du locataire. La première chose qu’il vit fut le grand lit installé au fond de la pièce. Les couleurs des murs donnaient un aspect réconfortant à l’endroit, les lumières accrochées de manière négligée n’y étaient pas pour rien. Sur un des murs, au-dessus de la commode, étaient accrochées des dizaines de photos de type polaroïd où Lion se tenait pour la plupart, le sourire sur le visage et entouré. Ash se dit qu’il s’agissait de son cercle d’amis.

Puis, il s’attarda sur le bureau à l’opposé de la commode. Il était assez étrange puisque s’il s’agissait d’un bureau normal, ce qui était dessus n’était pas forcément destiné à se trouver sur un bureau. Il s’y trouvait plusieurs pots de fleurs aussi belles les unes que les autres. Il semblait à Ash qu’elles étaient rares, mais il ne connaissait pas la botanique plus que ça.

- C’est mon petit jardin personnel… J’élève quelques fleurs qui servent à faire des soins. Mes compétences en magie naturelle me permettent d’en prendre soin et de fabriquer des remèdes. Donc si un jour tu as besoin de soin, tu peux venir ici.
- Ah, intéressant !
- Oui. Par contre, ne compte pas sur moi pour me déguiser en infirmier !

Leurs rires résonnèrent dans la pièce, puis, Ash se tourna vers Lion.

- J’imagine que la porte ici mène à la salle de bain.
- Ouais ! C’est ce qui est bien avec cet appartement. On a chacun une salle de bain dédiée. Tu veux aussi visiter ? Par contre, je ne pourrais pas te montrer la chambre de Nina, c’est accès interdit.
- D’accord, fais-moi visiter ta salle de bain.

Lion s’approcha de la porte pour l’ouvrir et laissa Ash jeter un petit coup d’œil à l’intérieur. Chaque salle de bain possédait sa baignoire et évidemment, son lavabo, ses toilettes et son armoire.

- Voilà, tu as fait le tour. T’as faim ? Oh, j’y pense, tu veux prendre une douche et manger avec moi ?
- Je… Ouais, mais je n’ai pas d’affaire de rechange…
- C’est rien ça. Je te prête des fringues ! On doit faire la même taille. Je suis un peu plus petit que toi mais ça devrait aller si je te file un t-shirt long.
- T’es sûr ? Je ne veux pas m’imposer non plus.
- Tu ne t’imposes pas si c’est moi qui propose. Puis, comme ça, je peux laver tes vêtements. Enfin, si tu as deux heures devant toi. Tu veux manger quoi ?

Ash fut un peu gêné par cette proposition. Il n’avait pas l’habitude de procéder de cette manière. En général, il allait chez des amis à qui il offrait une contrepartie pour ne rien devoir à personne ensuite. Là, Lion lui proposait ça tellement naturel qu’il serait réellement impoli de refuser. Surtout qu’il avait l’air si heureux qu’Ash reste un peu avec lui qu’il ne voulait pas le froisser. Alors, il accepta.

Chapitre 5
- Cadeau -

Peut-être était-ce une erreur. D’habitude, Ash allait plutôt chez des amis qu’il s’était fait pour se laver et laver ses vêtements. Et s’il avait trouvé ça impoli de refuser la proposition de Lion, il se demandait également comment il allait pouvoir le lui rendre. Car Ash donnait toujours quelque chose en retour lorsqu’il faisait appel à ses amis, que ce soit de l’argent, des bijoux, ou tout autre chose dont ils auraient envie ou besoin. Ash était toujours généreux, il donnait parfois un peu trop, mais il considérait que ce n’était qu’un modeste prix payé pour sa liberté.

Il prit le temps d’y réfléchir sous la douche, mais pas trop longtemps non plus. Il n’aimait pas prendre de longues douches pour la simple et bonne raison que ce serait gaspiller de l’eau dont il n’avait pas besoin. Alors, il sortit très rapidement de la douche et s’enroula dans une serviette. Il constata en ouvrant la porte que Lion lui avait préparé des vêtements propres qu’il avait pris soin de déposer sur le lit, laissant ainsi Ash avoir son intimité. Le magicien astral sourit alors, reconnaissant. Il se sécha puis s’habilla avant de se regarder dans le miroir.

Ash n’avait pas l’habitude de porter des survêtements. Son image ne lui déplaisait pas mais il n’y trouvait pas de plaisir particulier à regarder cet accoutrement non plus. Cependant, il était très confortable dans ces vêtements. Après avoir rangé sa serviette, il attrapa sa boule de fringues puis il sortit de la chambre de Lion pour le retrouver.

- Ah ! Tu as fini ! Mets ça dans le panier, je vais aller faire tourner une machine en bas.

Lion tendit le panier à linge à moitié rempli à Ash pour qu’il y dépose ses vêtements sales. Mais Ash ne bougea pas, se contentant de grimacer.

- Lion… Je ne suis pas vraiment pour ce que tu es en train de faire pour moi.
- Pourquoi ? C’est la moindre des choses.
- Non, justement. Je n’ai rien fait. Et je ne sais pas comment te remercier. Est-ce que tu veux de l’argent ?

Lion fronça les sourcils. Il ne comprenait pas pourquoi il lui demandait une telle chose. Son travail ne le rendait pas riche, certes, mais il vivait très bien comme ça. Puis, il comprit. Il comprit que c’était Ash qui n’avait pas compris. Alors, il lui expliqua, se détendant dans un soupir.

- Écoute, c’est juste ma façon de te remercier.
- Mais je n’ai rien fait.
- Bien sûr que si. C’est juste que… Tu ne le sais pas. Tu sais, on a passé une très bonne soirée. Et… Tu ne me connais pas encore assez pour savoir que je suis pas mal entouré, mais je préfère rester seul… Pourtant, ce soir-là, je voulais faire des rencontres, justement pour connaître d’autres personnes, échapper à ma solitude… Essayer de changer. Et je m’ennuyais, je ne voulais pas aller vers les autres. Et puis…
- Et puis tu m’as suivi… Mais je ne vois pas en quoi je t’ai aidé.
- Tu m’as fait passer une excellente soirée. Et même une excellente nuit. C’est ce dont j’avais besoin, vraiment. Rencontrer quelqu’un, ne pas discuter, ne pas faire les choses comme on le devrait et se laisser porter par le moment… Et par nos envies. Juste ça. Ressentir une connexion. Ça m’a fait un bien fou. Et je n’ai jamais été autant moi-même que quand j’étais avec toi cette nuit-là. Alors… S’il te plaît, laisse-moi te remercier.

Ash l’avait écouté, puis il avait laissé planer le silence pendant un petit instant. Il comprenait ce qu’il voulait dire, même s’il avait du mal à comprendre ce qu’il y avait de spécial là-dedans. Lui, il avait toujours fonctionné comme ça. Il n’avait jamais prétendu être quelqu’un d’autre, il n’avait jamais été qui que ce soit d’autre. Il s’apprêtait à insister jusqu’à voir la sincérité et la reconnaissance dans le regard de Lion. Alors, il céda et posa son linge dans le panier.

- … D’accord.

Le visage de Lion s’illumina par un large sourire. Ses yeux se mirent à briller comme ils ont brillé quand il a vu Ash devant la parfumerie. Quelque chose était en train de se passer entre eux, en réalité, quelque chose s’était déjà passé entre eux. Leur nuit ensemble n’avait rien de commun, ni pour Lion, ni pour Ash, quoi qu’il en dise.

- Super ! Oh et, je t’ai mis des vêtements confortables, je ne savais pas quoi te choisir mais rien ne t’empêche de faire un tour dans mon armoire si tu en as envie.

Lion avait essayé de décortiquer le style d’Ash pendant sa douche. Il lui avait d’abord prévu un beau jean avec un T-shirt simple et uni, et lorsqu’il était en train de choisir les accessoires – parce qu’il comptait bel et bien lui donner quelques accessoires, pour lui, ça ne servait à rien de lui donner une tenue si elle n’était pas complète – il avait décidé soudainement de changer tout ça. Parce que Lion avait quelque chose derrière la tête. Avant qu’Ash ne puisse répondre, Lion lui tourna le dos et lança, avant de sortir de la chambre :

- J’ai laissé des prospectus pour commander sur la table de la cuisine, jette un œil et choisis !

Puis, il s’éclipsa, laissant Ash seul dans l’appartement. On aurait pu se dire qu’il n’était pas très malin de faire ça, il ne connaissait rien de ce type, après tout. Mais Lion avait une confiance étrange envers lui. Il sentait qu’il pouvait lui confier sa propre vie sans aucun problème. Peut-être était-il un peu trop naïf. Ou peut-être qu’ils avaient une connexion spéciale.
En tout cas, ce fut gêné qu’Ash se rendit dans la cuisine ouverte pour découvrir les prospectus. Il regarda les menus de chacun d’eux et sortit quelques billets de son portefeuille après avoir fait son choix. Lion rentra à cet instant et leurs regards se croisèrent. Ash lui adressa un sourire et posa l’argent sur la table.

- Tu as choisi ?
- Seulement si tu me laisses payer.

Ash portait un sourire taquin aux coins des lèvres et Lion fit la moue, comme un enfant.

- Mais je voulais te remercier…
- Ouais, ben… Moi aussi, je veux te remercier. Parce que moi aussi j’ai passé une bonne soirée et une bonne nuit avec toi.

Lion céda.

- D’accord, d’accord.

Il vint près de son invité pour regarder les menus avec lui. Ils discutèrent de leurs choix quelques instants avant qu’Ash ne remarque l’absence de Lion. Il était là, physiquement. Pourtant, quelque chose lui disait qu’il était ailleurs, mentalement. Il avait l’air de penser à quelque chose.

- Tout va bien ?
- Oui, pourquoi ?
- Tu as l’air préoccupé…
- Oh… Ouais… En fait, j’ai quelque chose… En fait, non, j’ai deux choses. Un truc à te donner et un autre truc à te demander.

Lion afficha un sourire-grimace désolé, et Ash leva un sourcil de curiosité. Lion lui tendit donc le paquet qu’il avait fait emballer à la boutique.  

- Qu’est-ce que c’est ?
- Ouvre, tu verras.

Ash l’observa pendant quelques secondes avant de reposer les yeux sur le paquet. Il prit la boîte qui se trouvait à l’intérieur du sac puis déchira l’emballage. C’était un parfum, évidemment. Il eut alors une réaction qui fit rire Lion.

- Ah… Je pue ?
- Mais non ! Tu sens très bon. Mais je ne travaille pas en parfumerie par hasard. Disons seulement que je suis doué pour trouver le parfum idéale de chaque personne. Et comme j’ai réussi à percevoir ton odeur, ben je me suis dit que tu serais content de savoir que ce parfum, c’est le parfum qui t’irait le mieux.

Ash prit le temps d’examiner le parfum, puis il décida de taquiner Lion en gardant son sérieux.

- Donc… Mon odeur naturelle pue.
- Mais non ! J’ai jamais dit ça ! Tu sens bon !
- T’es sûr ? C’est pour ça que tu m’as demandé d’aller me doucher ?
- Mais… Mais non, je voulais juste te rendre service…

Ash fut content de voir que sa taquinerie fonctionnait. Et lorsque Lion se rendit compte que justement, ce n’était que de la taquinerie, il râla, prit une moue d’enfant boudeur et frappa doucement l’épaule de son invité.

- Tu es cruel !
- C’est toi qui l’es, tu ne m’as dit qu’une chose sur deux !
- AH OUI ! Oh, alors… Ben pour te faire pardonner de cette blague cruelle, tu pourrais… dormir à la maison ce soir ? Alors oui ! Je sais que tu ne dois pas rester enfermé à cause des astres et tout ça ! Je sais ! Mais je me dis que ce n’est que pour une nuit, et puis si tu veux, on peut aller sur la colline tous les deux et dormir là-bas, ça me dérange pas !
- Comment tu fais ?
- Je ne sais pas… De quoi ?
- Comment tu fais pour être aussi adorable ?

Lion rougit tandis qu’Ash sourit. Il enroula son bras autour de la taille de son hôte pour l’attirer à lui et plonger son regard brillant dans le sien.

- Ou alors… Diabolique ?
- Hein ?
- Je vois clair dans ton jeu, Lion.
- De quoi tu parles ?...

Lion était un peu déboussolé. Ash était tendre avec lui, presqu’amoureux, tout en lui parlant comme s’il allait lui planter un couteau dans le dos.

- Tu veux être avec moi cette nuit pour me faire des choses pendant mon sommeil.

Quand est-ce qu’Ash arrêtera d’être aussi taquin avec lui ? En tout cas, Lion n’avait pas fini de rougir. Il leva les yeux au ciel et soupira.

- Tu me fatigues ! Tant pis, je dormirais seul ce soir.
- Non, je reste. Mais si je meurs, je hanterais ta chambre pour l’éternité.

Lion sourit et hocha vivement la tête, heureux de sa décision.

- Deal !

Chapitre 6
- Hormones -

Ils avaient donc commandé pour deux. Ash insista pour payer, tant et si bien que Lion ne put faire autrement que d’accepter. Même s’il était gêné… Peut-être qu’ils n’avaient pas à s’en faire pour se rendre la pareille à chaque fois qu’ils se faisaient du bien. Mais c’était ainsi, dans la société, dans le flirt. Parce que, oui, ils flirtaient. Tout le temps. Ash avec ses taquineries, Lion avec ses moues d’enfant. Ils semblaient s’entendre à merveille, depuis le tout début. Ils n’avaient pas cessé de s’embrasser, au contraire, leurs baisers semblaient plus confiants. Ainsi, ils apprenaient à se connaître de cette manière-là également. Ash aimait mordre les lèvres de Lion tandis que Lion aimait passer sa langue sur les lèvres d’Ash. Et cela semblait plaire aux deux.

Installé sur le canapé du salon, ils avaient choisi un film à regarder. Lion avait allumé une bougie et installé un plaid sur leurs genoux. Leur position était confortable : Ash était assis normalement, son bras autour des épaules de Lion, mais Lion avait replié ses jambes contre son torse et sa tête était posée sur l’épaule d’Ash. De l’extérieur, on aurait dit un vrai petit couple passant une soirée normale, chaleureuse. Et eux aussi en avaient l’impression. Ils avaient la sensation qu’ils se connaissaient depuis toujours.

Au bout d’un certain moment pendant le film, Lion bougea. Il releva sa tête vers Ash et lui sourit. En retour, Ash étendit ses lèvres avant de les poser sur les siennes. Le plus naturellement du monde, ils se mirent à se bisouiller. Tendrement d’abord, presque chastement, même. Et puis, Lion posa sa main dans le cou de son partenaire et ce dernier n’hésita pas plus longtemps avant de rendre le baiser plus chaleureux. Plus humide. La chaleur grimpait doucement à mesure qu’ils s’embrassaient, ils avaient laissé le film de côté, comme s’ils l’avaient totalement oublié. Le bruit de leurs respirations devint plus fort et le corps de Lion bougea.

Il était dans une mauvaise position. Ce n’était pas la posture la plus adaptée pour s’embrasser. S’il continuait ainsi, il aurait certainement le cou en vrac. Alors, il quitta les lèvres d’Ash pour passer sa jambe de l’autre côté des siennes, s’installant ainsi à califourchon sur lui. Ses bras allèrent de chaque côté de sa tête et leurs corps s’étaient intimement rapprochés. Le baiser repris de plus belle, se faisant plus féroce, plus sensuel, plus envieux.

Ils étaient tous les deux sur un petit nuage. C’était comme s’ils étaient faits l’un pour l’autre, comme s’ils étaient nés pour cet instant précis. Leurs corps se demandaient l’un et l’autre, celui de Lion bougeant bien plus que celui d’Ash qui ne faisait que réagir à ses mouvements. Cependant, les mains d’Ash encourageaient le corps de Lion à bouger comme il le faisait. Ils étaient tous les deux en symbiose.

Jusqu’à ce que Lion sente les doigts d’Ash se glisser sous son T-shirt, avides de sentir sa peau nue. Lion attrapa ses poignets et rompit le baiser pour plonger son regard intense dans celui de Lion.

– Stop.
– Hein ?
– Ça suffit… C’est… trop.

Ash était tellement plongé dans cette bulle qu’ils avaient créée en un seul instant que la brise glaciale qu’il venait de se prendre ne parvint pas tout de suite à sa peau. Peu à peu, il reprit ses esprits. Et puis, la déception dans son cœur. La douleur du rejet dans sa poitrine. Le chaos dans sa tête.

– Comment ça, c’est trop ? Moi, j’en veux plus.

Lion le repoussa une nouvelle fois, se levant même pour le laisser seul sur le canapé.

– Il ne faut pas. On risque de faire quelque chose qu’on ne veut pas faire.
– Quoi ?
– Ne fais pas l’enfant, tu vois très bien de quoi je veux parler.

Non, il n’en savait rien. Mais il le sut par déduction. Il le comprit assez vite, d’ailleurs. Ash fronça les sourcils, s’il savait que Lion avait raison, il ne saurait expliquer pour autant la réaction provoquée par ces sentiments négatifs qui le plongeaient dans une colère sombre.

– Attends, tu étais prêt à te donner à un parfait inconnu et maintenant qu’on se connaît mieux, tu ne veux plus ?
– Mais non, ce n’est pas que je ne veux plus.
– Alors c’est quoi ?
– Ash. Tu es vierge.
– Oui. Et alors ?

Lion l’observa longuement sans rien dire. Il pensait qu’en lui évoquant une réalité, il se souviendrait de leur discussion dans les toilettes de la boîte de nuit où ils s’étaient rencontrés. Mais rien, il ne voyait rien dans ses yeux. Seulement une détermination et un agacement profond. Ash n’avait jamais été rejeté. Habituellement, c’était lui qui rejetait. Son ego en avait pris un sale coup.

– Alors, on ne peut pas.
– Juste parce que je suis vierge ? Sérieux ?
– Oui… Enfin non… Ash, on se connaît à peine, je ne veux pas que tu regrettes.
– Donc tu prends la décision à ma place.

Désormais, Ash aussi était debout. Son regard transperçait l’âme de Lion qui ne pouvait rien faire d’autre que de secouer la tête. Ce malentendu lui faisait mal aussi. Et s’il s’était trompé sur leur relation ? Et s’il avait pensé à tort qu’il y avait quelque chose de spécial entre eux ? Si tout ce qu’il avait ressenti jusque là n’était qu’une illusion ? Désespéré, il soupira et baissa la tête.

– Je suis désolé, Ash… Je crois que tu devrais partir.

Lion n’avait jamais pensé à mal. Il voulait seulement les préserver tous les deux mais il lui semblait qu’Ash n’était pas dans la réflexion. Il avait l’air d’être dirigé par ses émotions à l’heure actuelle et c’était bien cela qui avait créé malgré lui le malentendu. Ash ouvrit la bouche dès qu’il réalisa ce que Lion venait de faire : il le rejetait à nouveau. Mais son ego lui dicta de ne prononcer aucun mot. Il tourna seulement le dos à Lion et attrapa sa veste sur le chemin, partant vers la porte. Il s’arrêta devant elle, hésitant. Devait-il seulement partir sans rien dire ? Sans se battre ? Peut-être. Après tout, ils n’étaient encore que des inconnus. Ils ne savaient rien l’un de l’autre. Si cette relation était vouée à l’échec, alors il valait mieux abandonner.

Il eut une pointe au cœur en tirant la porte pour l’ouvrir, et lorsqu’il la referma, il ne bougea plus.