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 Wide Eyes

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æzel
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Wide Eyes EmptyVen 10 Nov 2023 - 21:47
Chapitre 1

- Allez, cette année va être meilleure.

Devant son miroir, Rye venait de finir de se préparer. Premier jour de lycée pour cette nouvelle année, il avait déjà certaines angoisses qui lui tordaient le ventre. C’était pour lui sa dernière année de lycée, l’obtention de son diplôme n’était plus très loin à présent. Mais si pour la plupart, les années lycées étaient les plus belles de leurs vies, il n’en était rien pour Rye. Pourtant, le garçon avait du potentiel. Ses hautes notes le prouvaient. Et peut-être que si ses années collège avaient été meilleures, celles du lycée l’auraient été également.

Il soupira face à son reflet. Voilà tout ce qu’il fallait aux autres pour le détester, le mettre à l’écart : Rye disposait d’un charme fou gâché par son état physique. La fatigue était maître de lui depuis aussi loin qu’il puisse s’en souvenir. Son teint fantomatique n’aidait pas plus que ses cernes constamment sous ses yeux. Depuis le collège, il ne faisait plus aucun effort vestimentaire, sinon celui de cacher son corps par des vêtements plus amples que nécessaire. Rye ne possédait un corps ni trop mince, ni trop gros. Au fil des années, sa fine musculature s’était révélée, lui laissant cette chance de paraître plus beau aux yeux des autres. Chance qu’il ne prît pas. A quoi cela aurait-il servi ? A rien, les autres le détestaient déjà.

Si son allure n’était pas son alliée, il en allait de même pour son comportement. Rye évitait soigneusement tout contact physique, s’échappait soudainement lorsque quelqu’un essayait de le toucher, même par-dessus ses fringues. Pour réduire les risques, il avait même décidé de s’isoler. Voilà ce qui a contribué à faire de lui quelqu’un d’étrange. Ce mec bizarre à l’allure bizarre et au comportement bizarre, celui qu’on ne voulait pas approcher. Par peur, peut-être. On ne sait jamais ce qui se cache sous un aspect physique.

Pourtant, les railleries allaient de bon cœur. D’abord surnommé « Fantomas » au collège, ce surnom changea pour un autre, bien pire, auquel Rye avait du mal à s’habituer : « Le Virus, si tu le touches, t’as le cancer ». Lui qui pensait que les enfants plus jeunes étaient cruels, il fut surpris de voir à quel point les adolescents pouvaient être bien pire que cruels.

Mais les railleries ne suffirent plus et se transformèrent même en un harcèlement difficile à supporter. Un isolement total aurait été le paradis pour lui si seulement il n’y avait pas ces personnes pour le regarder de travers, se moquer, lui lancer des vannes blessantes, allant jusqu’à cracher des chewing-gums dans ses cheveux, renverser son yaourt sur sa tête ou même voler ses fringues après le cours de sport.

Rye ne savait pas comment il avait pu supporter tout ça pendant ces deux années de lycée, mais il était encore là, se tenait debout devant son miroir, plein d’espoir, à se dire que ça changera. Ou que même si ça ne change pas, l’année prochaine, il ne serait plus là.

Le premier jour fut aussi tranquille qu’il l’aurait espéré. Personne ne le remarqua, son humeur fut si bonne le soir en rentrant chez lui. Humeur très vite bafouée par son angoisse profonde, revenant au grand galop. Toutes les années, c’était la même chose. Premier jour sympathique, le reste de l’année devenait de plus en plus insupportable. Pourquoi cette année serait-elle différente ?

Ce qui se passa le restant de la semaine lui fit perdre tout espoir. Les nouveaux furent mis au courant de son petit surnom, et voilà qu’on recommençait à se moquer de lui. Il passa son week-end enfermé dans sa chambre, comme à chaque rentrée depuis maintenant trois ans. Ses parents s’inquiétaient toujours mais Rye ne voulait pas qu’ils interviennent. Alors impuissants, ils essayaient de faire leur possible pour lui remonter le moral.

La semaine suivante fut étonnamment moins pire que la précédente. Même meilleure. Elle présageait en tout cas un changement radical dans sa vie de lycéen. Et tout ça à cause ou plutôt grâce à un seul étudiant. C’était le vendredi, journée que Rye appréciait tout particulièrement parce qu’elle signait la fin de la semaine de cours. Toujours, ce jour-là, il évitait les autres plus que d’habitude, allant jusqu’à se cacher dans des endroits insoupçonnés, sous les escaliers, dans le seul but d’être tranquille.

En sortant d’un de ses cours au matin, Rye devait faire un passage par son casier. Le couloir était bondé et il fallait faire un choix : y aller en évitant tout le monde, en se faisant petit, ou attendre que le couloir désemplisse au risque d’arriver en retard au prochain cours. Rye hésita longuement avant de se faufiler à travers la foule jusqu’à son casier qu’il atteignit avec une facilité surprenante. Il se hâta de l’ouvrir en redoutant le pire et le pire arriva presque. L’équipe de foot du lycée passa près de lui. Ses principaux bourreaux pour plusieurs raisons : ils avaient été les premiers à déclencher ce harcèlement, et comme ils étaient doté d’une certaine popularité, il n’était pas difficile de faire en sorte que pratiquement tout l’établissement les suive dans leurs bêtises.

L’un d’eux poussa Rye, soi-disant sans le faire exprès, d’une violence à peine mesurée. Rye heurta son casier de plein fouet et en tomba même au sol. Sonné, il releva son regard apeuré vers les rires moqueurs des amis de l’auteur de la bourde.

- Oups, prononça le garçon qui l’avait poussé.

Ses amis rirent de plus belle alors qu’il allait s’abaisser afin de continuer son petit manège. Mais l’étudiant sauveur apparut, vêtu de la même veste que celle de l’équipe de foot.

- Tu fous quoi, là ? « Oups » ? Excuse-toi, plutôt.

Il avait l’air en colère. Dans son regard en tout cas, aucune gentillesse ne transparaissait. Le bourreau se releva, n’ayant pas l’air de comprendre la situation. Depuis le début du lycée, il régnait en maître et voilà qu’un jeune arrivant devenu populaire en seulement quelques jours voulait tout bouleverser. Il n’était pas d’accord avec ça, mais Rye avait le cœur battant. Il regardait son sauveur d’un air plus admiratif qu’étonné : lui non plus ne comprenait pas la situation.

- Ven, tu viens à peine d’arriver, va falloir qu’on t’explique certaines choses ici.
- Ah ouais ? Explique-moi alors,
dit « Ven » en croisant les bras.
- Lui, c’est Le Virus. Personne ne l’aime, il n’aime personne, on le lui rend bien, c’est tout.
- Eh ben, c’est vachement mature, ici.


Ven se montra plus froid, plus cassant dans sa façon de parler ainsi que dans son attitude corporelle. Il faisait face à ce qui semblait être le roi de ce lycée sans aucune crainte et avait l’air sacrément en pétard. Le bourreau se mit à sourire et secoua la tête en haussant les épaules, penaud.

- Arrête un peu, mec. Exagère pas. Il va bien, tout le monde va bien ici. C’est que des blagues.
- Tu savais que le harcèlement était puni par la loi ? Moi je le sais. Tu devrais vraiment arrêter tes conneries et t’excuser avant de te retrouver derrière les barreaux.


Ses paroles assurées, son air menaçant, ce Ven était un ange gardien pour Rye. Tout le couloir était désormais silencieux, assistant à la scène en retenant son souffle. Même le capitaine de l’équipe le regardait avec une lueur de crainte dans le regard. Après quelques secondes de mûre réflexion, il soupira et se tourna vers Rye qui se relevait à l’aide des casiers.

- C’est bon, j’suis désolé, ok ? Allez, on y va, on va être en retard.

Sous cet ordre donné, la foule se remit à bouger et à chahuter comme si rien ne s’était passé. Rye put enfin respirer en voyant l’équipe partir mais il sursauta lorsque Ven s’adressa à lui avec un air plutôt calme et rassurant.

- Ça va ? C’est vraiment des grosses brutes. Désolé que t’aies dû subir ça.

Une main tendue vers Rye, Ven lui souriait à présent. La sincérité émanait fortement, si fortement que personne n’aurait pu en douter. Rye regarda sa main quelques secondes et secoua la tête, les épaules remontées par l’anxiété. Il ne devait pas le toucher. Ven leva un sourcil et laissa retomber sa main.

- Sois tranquille, ils ne viendront plus. Je ne sais pas combien de temps ça fait que tu subis ça mais je pense qu’ils ne risquent pas de revenir. Au fait, je m’appelle Ven. Et toi ?

C’était bien la première fois depuis son entrée au lycée que quelqu’un s’intéressait à lui et lui parlait aussi longtemps. Rye en fut si surpris qu’il se mit à rougir sans rien dire. Heureusement, Ven fut patient. Rye prit alors le temps de souffler un peu, histoire de ne pas passer pour un con même s’il était trop tard.

- Rye. Je m’appelle Rye.

Il tenta de lui adresser un sourire chaleureux mais il n’était tellement plus habitué et bien trop rongé par ses angoisses qu’il était certain que ce sourire ressemblait plus à une grimace qu’autre chose. Devant l’air tendre de Ven, Rye paniqua et lui tourna le dos pour fermer son casier à la hâte, partant ensuite pour rejoindre sa salle de cours. Cette fois, ce fut Ven qui se retrouva con mais aussi très intrigué par le garçon qu’on osait surnommer Le Virus.
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Chapitre 2

Ce qui s’était passé vendredi redonnait pleinement espoir à Rye que sa vie change pour de bon. Il s’était même imaginé une nouvelle scolarité, un nouveau monde identique au sien, dans lequel il ne serait plus qu’un adolescent normal qu’on ne remarquait pas. Un étudiant venu pour les cours et rien d’autre. Il s’était mis en scène en train d’avancer dans le couloir sereinement, pleinement conscient que tout le monde se fichait de lui. Personne pour le regarder, personne pour se moquer, personne pour le bousculer. Simplement des adolescents qui le laissaient tranquille. Il eut également l’envie de rêver à une certaine popularité mais il avait balayé ce rêve d’un revers de manche. Ce n’était pas pour lui et puis, il ne fallait pas en demander trop. La seule possibilité qu’il puisse être tranquille lui allait parfaitement.

Aussi, il pensait à Ven. Ce nouveau venu avait l’air d’être différent de tous les individus qu’il avait pu croiser jusque-là. Quelqu’un de profondément gentil et compréhensif, allant à l’encontre des valeurs qu’avaient les lycéens de son établissement. Si chacun suivait la mode lancée par les plus populaires, Ven avait l’air de suivre sa propre tendance sans jamais juger les autres.

Un garçon sociable, Rye n’était pas étonné qu’avec ce caractère, il était déjà en moins d’une semaine accepté dans l’équipe de foot et populaire. Et s’il avait entendu parler de  lui avant vendredi, Rye n’avait rien écouté. Parce que lui aussi, il préférait se faire son propre avis plutôt que d’écouter les autres. Lui aussi était différent. Mais lui, il était également très différent de Ven, qui, plutôt que d’avoir l’air bizarre, était beau, fort et avait du style.

Chaque samedi soir, Rye se rendait au parc abandonné de la ville. C’était autrefois un parc d’enfants, il y avait encore un bac à sable, une balançoire qui grinçait maintenant, ainsi qu’une petite maison de bois dans laquelle Rye avait l’habitude de se réfugier. Il y a une dizaine d’années, il était encore très animé jusqu’au jour où un drame eut lieu. Un enfant mourut dans le bac à sable et depuis, pas un chat ne venait en ces lieux maudits. Sauf Rye.

Il trouvait cet endroit apaisant. Chaque samedi, il s’y rendait, des souvenirs plein la tête. Lui aussi avait grandi dans ce parc. Il se souvenait de ces jours heureux où il courrait partout, suppliait sa mère de le balancer une dernière fois avant de partir, construisait des châteaux de sable aidé par son père et ses copains d’enfance.

L’époque était révolue et maintenant, il ne faisait plus que se cacher dans cette maison de bois, décolorée à cause du temps. Il restait en général jusqu’à minuit avant de rentrer. Ce samedi ne fit pas exception à la règle. Mais alors qu’il était plongé dans ses rêves de tranquillité, il entendit des bruits de pas se diriger vers lui. Il retint immédiatement sa respiration pour écouter au mieux.

Quelqu’un venait vers lui. Tendu, Rye attendait sagement que tous ces bruits partent mais il n’en fut rien. Une silhouette s’approcha et Ven se pencha pour regarder dans la petite maison. Il fut même surpris d’y trouver Rye.

- Oh. Désolé. Je ne savais pas que t’étais là. Je… Je vais aller me poser sur la balançoire.

Son visage affichait un air désolé, les lèvres pincées en un sourire exprimant le malaise. Et alors qu’il se redressait pour partir, Rye tendit soudainement la main vers lui.

- Non attends !

Pourquoi l’avait-il rattrapé ? Son esprit était plutôt confus mais il avait des choses à lui dire. Il ne le remercierai jamais assez de ce qu’il avait fait pour lui la veille, au lycée. Ce n’était pas encore confirmé mais il l’avait peut-être débarrassé d’un fardeau qui s’imposait sur ses épaules depuis bien trop longtemps.

- Tu peux rester si tu veux…

Hésitant, tremblant, Rye lui fit une place en se collant à l’un des murs intérieurs de la maison d’enfant. Il avait les joues rouges, c’était rare quand Rye s’imposait de cette façon. Quand il voulait discuter avec quelqu’un d’autre que ses parents. Ven semblait l’avoir compris car il fut tout aussi surpris de le voir là que de l’entendre lui proposer de rester en lui faisant une place. Néanmoins, il s’installa à côté de lui, tentant au maximum d’éviter tout contact.

Le silence plana un petit moment avant que Rye ne le brise. Il avait longuement respiré avant et parlait doucement afin d’éviter de balbutier et de se rendre idiot.

- Je voulais te dire merci pour hier. C’était cool.
- De rien. C’était pas cool, c’était normal.


Rye se pinça les lèvres. Comment pouvait-il considérer ce sauvetage normal alors que personne ne l’avait fait avant lui ? Il n’y arriverait certainement pas avant un bon moment.

- Oui… J’espère que ça ne t’a pas causé trop de torts.

Ven tourna la tête vers lui en fronçant les sourcils. Il avait du mal à comprendre comment il aurait pu lui causer du tort. Il y réfléchit tout en secouant doucement la tête pour lui faire comprendre que non, il ne lui avait causé aucun tort. Un long silence s’en suivit, puis un long soupir s’évada de sa bouche.

- Ça a toujours été comme ça ?

La question était peut-être indiscrète mais Ven ne la retira pas pour autant. Quant à Rye, il se mit à jouer nerveusement avec les manches de son ample pull et haussa une épaule en observant distraitement le parc à travers l’ouverture de la porte.

- Depuis le collège. Mais au collège, ça allait. C’était moins souvent et ils m’appelaient Fantomas alors…
- Ah…


Une lueur de déception brilla dans le regard de Ven, comme s’il s’attendait à une autre réponse.

- Mais tu sais, c’est pas si grave hein… Je m’y suis habitué maintenant, et puis, il vaut mieux que ce soit moi plutôt que quelqu’un d’autre.

Ven n’en crut pas ses oreilles. Entendre un tel discours… Ce n’était pas humain. Rye semblait habitué à toute cette violence, aussi bien psychologique que physique, et ça ne plaisait pas au plus populaire.

- Tu dis n’importe quoi. Il vaut mieux que ce ne soit personne plutôt que quelqu’un. Pourquoi tu te défends pas ?
- Parce que c’est pire si je me défends.


Rye soupira. Ven n’avait pas l’air de comprendre sa situation mais il ne lui en voulait pas. Il était juste agacé d’avoir ce genre de questions.

- Comment ça peut être pire, Rye ? Je comprends pas.
- Je ne peux pas les repousser. Tu sais ? Le contact, tout ça.


Rye commençait vraiment à être agacé par ce manque de compréhension. Mais encore, il n’en voulait pas à Ven. Il ne pouvait pas savoir son secret et il ne le saurait peut-être jamais. Ainsi, il ne pourrait pas comprendre. Cette fois, ce fut au tour de Ven de soupirer.

- Eh ben il va falloir que tu apprennes à le faire. Tu peux pas rester comme ça.
- Arrête, je te l’ai dit…
- Non, toi, arrête. On dirait que tu aimes te faire traiter comme ça, c’est épuisant. Arrête de te poser en victime deux secondes et défends-toi, merde.


Si Rye ne pouvait pas toucher les autres, il ne s’en priva pas à cet instant. Le bruit claqua dans l’air pour faire retomber le silence. Il s’était emporté et sa main aussi. Désormais, il pouvait contempler avec colère les marques de ses doigts sur la joue rougie de Ven.

- Tu sais rien du tout, tais-toi. Tu ne sais rien du tout. Je croyais que t’étais différent des autres, que tu comprendrais mais en fait, t’es comme eux. Si ça va pas dans ton sens, tu craches ton venin.

Ven riposta, attrapant les poignets de Rye pour le bloquer contre la paroi. Son regard enragé planté dans le sien, il devint plus menaçant. Si Ven était un gentil garçon, il ne supportait pas la violence. Surtout qu’ils étaient en train de discuter. Et Rye s’en prenait toujours plein la gueule, pourtant, il avait osé le gifler. C’était donc à son tour de répliquer. Mais en voyant le regard apeuré de Rye, Ven le lâcha brutalement, s’écartant de lui jusqu’à sortir de la cabane.

- Tu m’emmerdes. Vous m’emmerdez tous avec vos valeurs à la con. « Scott est le roi de ce lycée, gnagnagna, on peut rien faire, gnagnagna », si c’est ça votre roi ben j’ai de la peine pour vous. Et pour toi en particulier. Ouais, toi, Rye. J’suis sûr que tu pries tous les jours pour que ça s’arrête sans rien faire d’autre. Tu fais rien et tu l’autorises à continuer.

La colère de Rye s’était transformée en désespoir. Non seulement il avait eu peur de Ven un instant, peur de lui, de ce qu’il pourrait lui faire mais aussi de ce que lui-même aurait pu faire à Ven avec ce contact. Mais en plus, Ven lui crachait des mots criants de vérité sans savoir dans quoi il avait mis les pieds. S’il avait l’impression d’avoir tout gagné cette année avec Ven comme allié, maintenant, il avait l’impression d’avoir tout perdu à nouveau. Ses larmes brûlaient ses joues refroidies par le vent, il voulait fuir, se transformer en souris pour se terrer dans un trou et que personne ne le retrouve jamais.

Quant à Ven, il l’observa longuement se noyer dans son désespoir tandis qu’il commençait à peine à entendre ses sanglots. Devenant petit à petit maître de lui-même, il soupira, secouant sa tête.

- Putain… Tu sais quoi, Rye ? Laisse tomber.

Puis, Ven partit, laissant Rye seul, abandonné dans sa petite maison en bois décoloré, encore tremblant de peine.
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Chapitre 3

Alors que Rye pensait avoir trouvé un allié de taille en Ven, il venait de se rendre compte qu’il s’était lourdement trompé. Évidemment, Ven l’avait aidé à éloigner les grosses brutes mais maintenant, qu’allait-il faire ? Cette dispute avait été beaucoup trop. Les mots tranchants de Ven avaient blessé Rye au plus haut point et également, lui avaient provoqué des angoisses. Maintenant que Ven pensait avoir vu juste sur Rye, qu’allait-il en être ? Allait-il continuer sa protection ou l’abandonner jusqu’à l’ignorer et ainsi, ignorer son harcèlement tout aussi bien que les autres ?

Rye avait peur. Il avait goûté à quelques jours de tranquillité et il avait beaucoup trop aimé ça. Peut-être aurait-il mieux fait de le laisser dans sa situation. Peut-être que Ven n’aurait pas dû réagir. Parce que maintenant, Rye avait peur, davantage qu’avant. Ce n’était pas bon pour lui. Ce soir-là, Rye s’était couché la boule au ventre, ne sachant pas quoi faire pour se calmer. Toute la nuit, les paroles de son allié éphémère avaient tourné en boucle dans sa tête. « Tu fais rien et tu l’autorises à continuer ». « Arrête de te poser en victime ». « Tu m’emmerdes ».

« Tu m’emmerdes ».

Alors qu’il pensait avoir trouvé un ami, il découvrait le mal que ça faisait de se sentir abandonné. Mal inconnu jusqu’à maintenant, et il aurait aimé ne jamais le découvrir. Il passa une nuit affreuse à faire des cauchemars, à rêver de ce moment où Ven le rejetait totalement, à sentir son cœur se fissurer un peu plus alors qu’il avait commencé à recoller les morceaux de manière fébrile à la colle pour enfants. L’espoir avait totalement disparu, il ne s’était pourtant rien passé de particulier entre eux mais ça avait été suffisant pour faire battre le cœur de Rye, lui redonner une énergie mentale. Tout avait été balayé par des mots aussi durs que du béton.

Ainsi, il passa son week-end à essayer de penser à autre chose, en vain. Il essaya même d’évacuer la peur en s’occupant l’esprit, toujours en vain. Rien ne fonctionna. Il finit par s’effondrer dans son lit le dimanche soir, la boule au ventre de retrouver son ancien quotidien. Trop fatigué d’avoir pensé tout le week-end, d’avoir angoissé, il s’écroula dans un sommeil sans rêve. Court, car il se réveilla à cause d’une pointe d’anxiété posée là, dans son ventre, piquant son estomac. Sept heures pétantes.

Il s’assit sur le rebord de son lit, poussant un soupir las, fatigué. Une nouvelle journée allait commencer pour lui au lycée et il ne savait pas comment ça allait se passer. Il préféra ainsi se préparer au pire. S’il était tranquille, ça serait bénéfique. Mais il ne préférait pas se faire trop d’espoirs.

En passant les grandes grilles de l’entrée de son lycée, Rye eut un automatisme bidon. Sans s’en rendre compte, il chercha Ven du regard. La déception put se lire dans ses yeux alors qu’il ne le trouvait pas. Et puis, il reconnut son visage souriant, entre deux membres de l’équipe de foot. Son cœur se mit à battre un peu plus rapidement, son souffle se coupa, signe que son espoir renaissait à nouveau.

Ven croisa son regard. Il perdit son sourire puis baissa les yeux, avant de donner à nouveau son attention à son équipe. Les épaules de Rye s’affaissèrent, comme si l’espoir était de nouveau parti. Oui, tout espoir disparaissait soudainement alors qu’il venait seulement d’apparaître. Qu’est-ce qu’il avait été imaginer de toute façon ? Ce Ven n’était pas son ami. Il ne le connaissait même pas, alors il ne lui devait rien. Mais alors, pourquoi ça lui faisait aussi mal ? Avait-il compris l’importance qu’était d’avoir des amis dans sa vie ? Non. Il était juste paumé, plus que jamais maintenant.

Alors, il laissa sa journée s’écouler, s’étonnant encore qu’on le laisse tranquille. Mais finalement, il n’y faisait même pas attention, à ça, trop concentré sur ses pensées pour remarquer les autres. Il ne pouvait pas s’être attaché en si peu de temps. Juste une discussion, une engueulade, pourquoi ça l’atteignait autant ? Rye avait du mal à supporter tout ça. Le fait d’avoir eu l’espoir que quelqu’un devienne proche de lui, assez pour qu’il puisse lui confier son secret un jour mais qu’on le lui retire aussitôt. Tout ce qu’il a toujours rêvé d’avoir au fond de lui sans jamais le montrer une seule seconde : un ami.

Son sommeil fut dérangé par quelques cauchemars, Rye devint un peu plus fatigué, ailleurs. Ainsi, le mercredi suivant, alors qu’il n’avait cours que le matin, il se retrouva en retard. Sacrément en retard, d’ailleurs. Le couloir était déjà vide lorsqu’il cherchait encore son cahier au fond de son casier. Il allait manquer le cours si ça continuait. Seuls ses râles brisaient le silence établi, jusqu’à ce qu’il sente une présence près de lui. En tournant la tête, il eut un sursaut. Ven était présent, l’observant d’un regard plutôt sérieux. Et Rye le questionnait du regard. Il allait sûrement bientôt savoir ce qu’il lui voulait, s’il lui en voulait encore, pourtant il ne percevait aucune haine dans son expression impassible.

Ce fut alors que Ven se rapprocha, laissant donc Rye plaquer son dos contre le casier. Rye ne voulait aucun contact et c’était pour une raison bien précise, raison inconnue du monde entier. Ven put voir traverser une lueur de crainte dans le regard de Rye, il baissa alors le regard quelques secondes avant de le plonger dans celui de Rye, tentant de le charmer comme il le pouvait, d’instaurer un climat de confiance, de l’obnubiler. Mais il n’avait pas besoin de ça, les pensées de Rye étaient déjà envahies par son parfum, son visage, le contour marqué de ses lèvres pulpeuses.

Une main sur le casier pour bloquer Rye, l’autre se releva pour frôler des doigts sa mâchoire. Ils se fixaient intensément, et Rye ne sentait même pas les doigts de Ven parcourir le bas de son visage dans une lenteur extrême et possessive. Pourtant, il faisait maintenant plus qu’effleurer sa peau, il la touchait. Rye aurait dû le sentir, la chaleur agréable électrisant sa peau. Son esprit était comme figé dans le temps, tout autant que l’était ce moment. Figé dans le temps, figé dans l’air, même sa respiration se coupait brièvement, silencieuse. Il n’entendait plus que les battements de son cœur augmenter le rythme. Et lorsque son regard quitta le sien pour aller se poser sur ses lèvres entrouvertes, seulement alors, il comprit.

Rye se reprit d’une manière assez agressive. Il repoussa Ven, dégageant sa main d’un bras, écartant son corps de l’autre. Il avait baissé la tête de façon qu’on ne puisse pas voir son regard. Aucun mot ne fut prononcé. Aucune parole ne fut dite. Et maintenant, ce qui ruinait le silence, ce furent les pas bruyants de Rye qui fuyait à vive allure.

Ven se retrouva seul. Seul face à ses propres actes. Mais aucune culpabilité ne traversait son expression, rien d’autre qu’un soulagement ainsi qu’un petit sourire. Il savait. Il venait de tout découvrir, toutes ces raisons pour lesquelles Rye évitait soigneusement chaque contact. Raisons pour lesquelles il avait toujours l’air si fatigué, le teint livide, blafard, des cernes jusqu’en bas du visage.

Cela faisait déjà quelques jours qu’il y réfléchissait. Depuis leur rencontre au parc d’enfant, depuis leur dispute. S’il s’était autant emporté, c’était qu’il n’avait pas su s’il devait lui en parler ou non. La situation n’était que trop peu propice aux confidences. Il fallait l’avouer, ils ne se connaissaient qu’à peine, alors même si son hypothèse était exacte, il ne pouvait décemment pas lui en parler ouvertement. Il n’avait pas été certain qu’il s’agissait réellement de cette raison.

Désormais, il savait. Il savait et il allait pouvoir arranger les choses entre eux. Lui dire qu’il le comprenait très bien. Qu’il était comme lui. Qu’il n’était pas tout seul. Et le nourrir comme il le fallait. Dans cette optique si positive et sans même penser à la possibilité que Rye refuse son aide, Ven foula le couloir de ses pas tranquilles. Il arriva à la cachette de Rye, les toilettes pour garçons, y entra en y jetant un regard au préalable.
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Chapitre 4

Rye avait beaucoup de mal à y croire. Ven avait osé le toucher, il avait osé braver le seul interdit qu’il lui avait posé. Rye ne comprenait pas pourquoi il l’avait fait. Il ne comprenait pas non plus comment il avait fait pour se laisser autant aller. Comment Ven avait fait pour le charmer à tel point qu’il en oubliait un de ses principes les plus basiques. Pas de contact physique. Et maintenant, c’était foutu. Il n’allait pas pouvoir suivre son cours, il allait devoir rentrer chez lui. Expliquer à sa mère pourquoi il avait ces yeux-là. Ce regard qu’il cherchait tant à fuir depuis des années. Il avait suffi que Ven débarque de nulle part pour tout essuyer d’un revers de main, tout son travail pour qu’on ne le touche pas, voilà que tout était détruit.

Ven… Qu’allait-il raconter aux autres ? Et s’il allait dire que Rye était un monstre à toute sa bande ? Le cauchemar allait recommencer, empirer certainement face à cette révélation. Ses pensées s’éparpillaient tandis que la colère grimpait en lui, petit à petit, sans vouloir redescendre. Il n’osait même plus se regarder dans le miroir. Ce n’était pas grand-chose. Ven ne lui avait pas donné grand-chose. Mais ça avait été suffisant pour le réveiller. Et cette énergie, il la consumait par sa colère.

Un raclement de gorge se fit entendre. Ven signifiait sa présence pour ne pas surprendre Rye, qui ne daigna même pas se retourner vers lui. Il l’avait vu dans le reflet du miroir, il savait bien que c’était lui. Mais il ne savait pas quoi lui dire. Il aurait aimé s’acharner sur lui, lui jeter toute sa haine au visage jusqu’à ce que Ven ne puisse rien faire d’autre que de ramper. L’abattre de sang-froid sans une once de remord. Mais il n’était pas comme ça. Non, sa nature revenait au grand galop. Rye n’était pas ainsi. Et Ven l’avait bien aidé.

- Qu’est-ce que tu veux ?

Voilà tout ce qui sortit de sa bouche. Une seule question, ça aurait très bien pu en être une autre. Il aurait pu lui demander pourquoi il l’avait touché. Ce qu’il allait raconter aux autres, maintenant qu’il avait vu ce qu’il était. Il aurait même pu lui demander s’il était venu pour se moquer de lui. Mais il n’était pas sûr.

- Juste m’excuser et te dire que je connais ton secret.

Les bras croisés sur son torse, Ven resta calme. Dans sa tête, contrairement à celle de Rye, tout était clair comme de l’eau de roche. Il savait et c’était tout ce qui comptait.

- Non, tu sais rien du tout, Ven.

Ses doigts se serrèrent sur la surface froide du lavabo alors qu’il fermait les yeux. Une expiration longue s’en suivit avant que Ven reprenne la parole.

- Bah, je sais au moins que t’es un Ridien.
- Je t’avais dit de ne pas me toucher.
- Il fallait que je le fasse
- Non.


Cette fois, Rye fit face à Ven, son regard encore lumineux et plein de colère posé sur lui.

- Je t’avais dit de pas le faire. T’aurais pas dû le faire. J’aurais pu…

Silence pesant. Rye retint sa respiration quelques secondes, puis soupira lentement.

- T’aurais pas dû.

Ven l’observa longuement sans rien dire, laissant le silence et le temps calmer Rye. Cela ne suffirait probablement pas mais au moins, il aura eu le mérite d’essayer. Il tenta ensuite un rapprochement, faisant un pas vers lui. Mais en le voyant reculer, le regard aussi haineux, Ven s’arrêta.

- Tu te demandes pas comment je le sais ?
- T’es allé à la bibliothèque ? Bravo, j’te félicite.


La sarcasme dont faisait preuve Rye étonna Ven. Il ne le pensait pas capable de telles réponses, pourtant, ça ne l’atteignait pas vraiment. Mais il sentait que la phrase n’avait pas été prononcée pour l’atteindre, seulement pour se défouler.

- Non. Je suis un Ridien, moi aussi.
- Ouais, bah ça me fait une belle jambe.


Visiblement, Rye était beaucoup trop en colère pour comprendre toute la signification qu’avait cette confidence. Aux yeux de Ven, il semblait trop concentré sur lui-même pour voir tout le bien que cet aveu pourrait lui faire. Ven n’allait pas avoir d’autre choix que de le lui expliquer.

- Est-ce que tu comprends ce que je te dis ou t’es trop égocentrique pour ça ?
- Pardon ? C’est qui l’égocentrique ici ? Celui qui vient de se faire toucher sans consentement ou celui trop obnubilé par sa théorie qu’il en a oublié de demander la permission ?


Aucun doute, Rye était bel et bien en colère contre Ven. Et il avait raison de l’être.

- T’as raison, j’suis désolé. Je me voyais pas t’en parler de but en blanc, comme ça, alors qu’on se connaît pas, c’est tout. Et il fallait que j’en sois sûr.
- C’est pas des excuses, ça.


Ven soupira à son tour. Cette fois, il osa s’approcher, levant ses mains dans une promesse silencieuse de ne pas recommencer.

- Écoute, je voulais seulement savoir pour t’aider. C’est tout.
- Et tu vas faire quoi maintenant ?
- J’en sais rien. Je me suis dit qu’on aurait pu se soutenir, toi et moi, vu qu’on semble être dans le même bateau.


Rye secoua la tête.

- On n’est pas dans le même bateau. Je suis seul et toi tu as ta p’tite bande d’amis. On ne partage même pas une barque.
- Très bien, Rye. Tu veux quoi ? Que je me débarrasse de mes potes pour qu’on puisse être amis tous les deux ? Comme si c’était vraiment ça qui gênait.


Cet accès de colère de la part de Ven ne laissa pas Rye indifférent. Alors qu’il ouvrait la bouche pour répliquer, il se ravisa instantanément. Il ne souhaiterait jamais à quiconque de se retrouver seul autant qu’il l’était. Alors, honteux, il baissa les yeux et secoua la tête.

- Non. Mais tu peux pas faire ça et venir comme une fleur pour me proposer d’être ton ami.
- Et pourquoi pas ?
- Parce que ça fonctionne pas comme ça.
- Tu dis ça parce que t’es en colère.


Bien sûr qu’il était en colère. Comment ne pouvait-il pas l’être ?

- Et tu t’attendais à quoi, sérieusement ?
- A rien qui ne te corresponde…


Ven avait murmuré sa phrase, plutôt pour lui-même que pour Rye. Il se rendait compte que si Rye le cachait, il avait tout de même son caractère et ça n’était pas pour lui déplaire.

- Je suis vraiment désolé, tu as raison, je n’aurais pas dû m’y prendre de la sorte.
- Ouais… Bah… Le refais plus.


Ven pinça ses lèvres en un mince sourire. La situation commençait à se dégoupiller, même un peu, et ça lui faisait plaisir. Rye fouilla dans sa poche pour en sortir son téléphone, il devait appeler sa mère, maintenant. Mais Ven l’arrêta en lui tendant sa paire de lunettes de soleil.

- Tiens. Je peux te ramener chez toi, si tu veux.

Rye était sceptique. Si Ven lui avait clairement montré son intention de l’aider dès le début, dès son arrivée, maintenant, il ne savait pas quoi penser de tout ça. Il prit les lunettes entre ses doigts et réfléchit à sa proposition quelques secondes. Que pouvait-il lui arriver de toute façon ? Et puis, au moins, il ne dérangera pas ses parents. Déposant les lunettes sur son nez, il se mit alors à taquiner Ven d’un fin sourire sur les lèvres.

- Mh… Et après on tombera amoureux et on vivra une histoire comme dans les livres, tu vas me sauver du mal et tout, et tout.
- Putain… Tu sais pas dire merci en fait.
- Mais si ! Merci, Ô mon prince, de m’avoir sauvé du terrifiant Scott et de sa meute de loups affamés !


Ven eut un large sourire et leva les yeux au ciel. Ils se détendaient enfin et ça lui faisait plaisir de découvrir un Rye plus à l’aise, moins intimidé. Peut-être était-ce l’adrénaline de sa colère encore présente, peut-être que tout ça retombera et qu’il deviendra de nouveau le Rye timide et faible qu’il connaissait. Mais ça lui importait peu.

- Ouais, bah ton prince il va pas porter ton sac. On y va ?
- Roooh, quel prince en carton.


Enfin, ils prirent la route vers la sortie du lycée. Rye se sentait beaucoup mieux maintenant qu’il savait que Ven voulait se rapprocher de lui. Ses espoirs s’étaient confirmés : il avait bel et bien trouvé un allié en lui.
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Wide Eyes EmptyVen 10 Nov 2023 - 22:08
Chapitre 5

Rye observait la voiture de Ven avec un grand scepticisme. Il ne s’était jamais senti très confortable à l’idée de monter dans la voiture d’inconnus. Ven n’en était pas vraiment un mais à ses yeux, il le restait quand même. Rye n’avait aucune idée de la façon dont Ven pouvait conduire et ça l’effrayait.

— Mh… C’est une nouvelle voiture ? Elle a l’air neuve.
— Nouvelle ? Non. Enfin, elle n’est pas si vieille mais elle n’est pas neuve non plus.
— Donc… Tu prends plus soin de ta voiture que…
— Je t’interdis de finir cette phrase.


L’ambiance était légère et Ven eut un large sourire après son interdiction plutôt sérieuse. Il n’avait pas envie d’être considéré comme un homme prenant plus soin de sa voiture que de ses proches, mais il savait parfaitement que Rye plaisantait. D’ailleurs, celui-ci souriait également, repoussant ses craintes par de l’humour, comme un mécanisme de défense fragile.

— J’ose au moins espérer que tu conduis bien.
— Eh bah t’as qu’à monter, tu le sauras aussitôt.


Alors que Ven avait déjà fait le tour de la voiture pour s’installer, Rye hésita un instant. Il pourrait tout simplement attendre le bus plutôt que de prendre place dans la voiture de son nouvel allié. Mais était-ce réellement une bonne idée ? Ven avait clairement évoqué son envie de se rapprocher de lui en tant qu’ami, il n’était pas vraiment nécessaire de le repousser. Surtout que Rye avait apprécié cette intention à sa juste valeur, peut-être même un peu plus. Après un long soupir, il se décida enfin et ouvrit la portière pour se glisser à l’intérieur de l’habitacle. Il prit soin d’attacher sa ceinture avant d’observer l’intérieur de la voiture. Elle était clairement bien entretenue et l’odeur de vanille douce diffusée le prouvait. Pas une once de poussière sur le tableau de bord n’était présente.

— C’est quoi ton adresse ?

Ven était déjà en train de configurer le GPS alors que Rye sortait à peine de ses pensées. Il eut même besoin de quelques secondes afin de comprendre sa question. Puis, il indiqua rapidement son adresse avant de porter son regard sur le visage du conducteur.

— Tu raccompagnes souvent des gens ?
— Pas vraiment. Les moments où je conduis sont les seuls moments où je me retrouve tout seul et pendant lesquels je peux penser librement alors…
— Ah, je vois. Mais pourquoi t’es dans l’équipe si t’as besoin d’être seul ?
— J’ai pas vraiment besoin d’être seul. Je dis juste que conduire, c’est agréable et que j’en profite quand je peux.


Rye se dit qu’un petit trajet n’était pas assez long pour se ressourcer autant qu’il le fallait. Alors une autre question lui vint tandis qu’il constatait agréablement que Ven avait une conduite assez souple.

— Mh… Est-ce qu’il t’arrive de partir loin quelques fois juste pour le plaisir de conduire ?
— C’est une proposition ?
— Pardon ?


Ven portait un petit sourire en coin qui montrait son air taquin, le regard fixé sur la route. Quant à lui, Rye ne comprenait pas trop où il voulait en venir.

— Bah, est-ce que t’es en train de me proposer de faire un long détour avant de te déposer ?
— Ben, pas vraiment. J’étais juste curieux.


Le sourire de Ven s’évanouit quand il comprit que Rye n’avait rien saisi à cette vanne. Il pinça alors les lèvres pour retenir un soupir qui aurait été trop bruyant et peut-être blessant.

— Laisse tomber. C’était juste une vanne.
— Ah… Désolé. J’ai épuisé mon stock d’humour tout à l’heure.


Ven devint silencieux. Son esprit était soucieux, maintenant. Rye avait toujours l’air d’un fantôme avec son teint pâle et ses cernes. Et il sentait bien tout de suite qu’il était fatigué, raison pour laquelle il n’avait pas compris sa blague.

— T’as faim ? On pourrait aller manger quelque part si tu veux.
— Euh… Peut-être une prochaine fois… OK ?
— Ouais…


Alors là, Ven était complétement paumé. Lui qui essayait de se rapprocher de Rye, c’était plutôt loupé. Si l’ambiance avait été légère, ça n’avait pas duré longtemps pour autant. Et puisque Rye semblait éviter toute forme de rendez-vous amical, Ven décida d’arrêter d’essayer. Il se contenta donc de suivre le GPS en silence, se plongeant ainsi dans ses pensées.

Rye observait le paysage par la fenêtre. Le fait d’avoir loupé cette blague le faisait angoisser. Il s’en voulait, se disait qu’il aurait pu le deviner puisqu’il avait initié la conversation. Alors comment avait-il pu manquer la vanne ? Pendant que Ven pensait et conduisait, Rye se torturait silencieusement tout en triturant ses manches, les joues rosies par la gêne.

Quelle étrange situation. Avoir des amis n’était pas la chose la plus facile pour Rye qui a toujours été seul au monde. Pourtant, il aimait la présence, même silencieuse, de Ven. Il était peut-être dans un état d’anxiété à ce moment-là mais savoir que Ven était à côté de lui le rassurait quelque peu. En effet, Ven l’avait sauvé du harcèlement qu’il subissait alors Rye se sentait tout naturellement en sécurité avec lui. Même s’il avait peur de sa conduite, il avait eu le temps de constater qu’elle était bonne et qu’il n’avait rien à craindre, encore une fois.

Mais Ven avait également l’air d’avoir du caractère. La dernière fois qu’ils s’étaient vus au parc, ils s’étaient disputés avec violence et Rye l’avait même frappé. Lui qui était contre la violence, il avait été le premier surpris de ce geste et s’en était même instantanément voulu, bien que la colère ait été plus forte que tout à ce moment-là. Alors, Rye craignait que Ven ne lui en veuille à cause de son manque de compréhension mais également pour la violence de son geste.

— Voilà, on est arrivés.

Les paupières de Rye papillonnèrent un instant pour revenir à la réalité lorsque la voix de Ven le sortit de ses songes. En regardant à l’extérieur, il vit que Ven s’était garé juste devant sa maison. Le moteur était encore allumé, signe qu’il ne comptait pas s’éterniser ici, et son regard insistant lui faisait clairement comprendre qu’il voulait que Rye sorte du véhicule.

— Oh ben… Merci, Ven.
— Y’a pas de quoi.


Lèvres pincées, Ven continuait de le regarder. Et si Rye interprétait son regard comme insistant, ça n’était pas le cas en réalité. Ven s’inquiétait simplement pour lui mais il n’était pas du genre à forcer les gens à se confier sur ces choses-là. Mais Rye se décida finalement à sortir de la voiture sans rien dire.

—  A plus tard alors.

Lorsque la portière claqua derrière lui, Ven soupira longuement. Leur relation n’avait pas beaucoup avancé. Maintenant, Rye connaissait les intentions de Ven et ce dernier connaissait le secret de Rye. Les deux étaient des Ridiens et pouvaient donc se comprendre autant que s’entraider.

— Oh, pardon, j’ai oublié de te rendre tes lunettes !

Rye avait rouvert la portière pour rendre les lunettes de soleil de Ven à leur propriétaire. Mais Ven refusa en secouant la tête.

— Tu peux les garder, ça ira pour moi.

Un sourire rassurant pointa le bout de son nez sur les lèvres de Ven tandis que Rye hocha la tête, hésitant.

— D’accord. Merci alors…

Ainsi, Rye rentra chez lui et Ven soupira à nouveau. Il observa un petit moment la maison et la boîte aux lettres pour y trouver le nom de famille de son nouvel ami. Waldhael… Ce nom ne lui était pas inconnu. Mais peut-être était-ce parce qu’il était commun ? Ven en doutait fortement. Smith était un nom de famille très courant. Waldhael l’était beaucoup moins. Ce fut accompagné de ces questions que Ven repartit chez lui, seul et sans lunettes de soleil.

L’après-midi, Rye se détendit en écrivant ses pensées et tout ce qui lui traversait la tête dans un carnet. C’était pour lui le seul moyen d’évacuer toutes ses émotions. De cette manière, personne d’autre que lui ne pourrait les lire et les juger, et elles n’étaient plus dans sa tête. Lorsqu’il se rendit compte qu’il arrivait mieux à décrire ce qu’il ressentait en l’écrivant à l’encre de son stylo, il fut un peu affligé. Il n’avait même pas été capable de communiquer avec Ven, il ne savait le faire qu’à l’écrit. Mais qui pourrait l’en blâmer ? Après tout, il avait été seul toute sa scolarité durant. Personne ne lui avait jamais appris à discuter avec confiance.

Ainsi, il en arriva à la conclusion qu’il devait se forcer à communiquer avec Ven s’il voulait en faire son ami. Comment allait-il s’y prendre ? Il n’en avait encore aucune idée mais cela lui viendrait certainement avec le temps, à force d’essayer. Il fallait aussi qu’il remédie à cette fatigue constante qu’il ressentait parce qu’elle l’empêchait de réfléchir correctement. Maintenant qu’il avait quelqu’un sur qui compter, il fallait qu’il réfléchisse à une solution. Mais réfléchir en étant fatigué… Le petit gain d’énergie que Ven lui avait offert n’était pas suffisant pour lui. Alors, il prit un carnet vierge avec une couverture qu’il appréciait particulièrement : une couverture rigide blanche avec un beau renard dessiné dessus. Et il noircit les pages.

De son côté, une fois rentré chez lui, Ven alla s’étendre dans son lit après avoir sélectionné quelques bouquins. Le nom de Rye l’avait assez intrigué pour qu’il fasse des recherches dessus. Alors il passa quelques heures le nez plongé dans les bouquins, en vain. Aucun d’eux ne semblait laisser le nom de Rye paraître, comme s’il était secret. S’il savait où chercher au premier abord, désormais, il était plutôt perdu. Une dernière tentative, il livra un dernier combat en lisant un bouquin caché dans le fond de sa bibliothèque traitant de l’histoire de Ridwise.
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Wide Eyes EmptyVen 10 Nov 2023 - 22:13
Chapitre 6

« Ridwise est une île située en plein milieu de l'océan atlantique. Elle est préservée et cachée de tous grâce à une bulle protectrice. Aucun humain normalement constitué ne peut y accéder à moins d'être accompagné par un Ridien. »

Ven savait déjà toutes ces choses par cœur. Il avait longuement lu et relu ce vieux bouquin au cours de sa vie, contenant toute l’histoire de Ridwise et tout ce qu’il fallait savoir sur les ridiens. C’était un livre utilisé pour inculquer l’histoire de leur nature aux enfants ridiens qui ne savaient encore rien de ce monde. Ven était persuadé qu’en fouillant là-dedans, il trouverait ce qu’il recherchait. Ce nom lui était familier. Pourtant, il n’arrivait pas à se concentrer suffisamment pour le retrouver.

« En 1706, le peuple Ridien vivait en harmonie. Seulement, un petit groupe dissident venait rompre la paix de Ridwise. Grimguth Leofu exigeait son pouvoir, argumentant le changement de roi avec des projets ambitieux qui plaisaient à la majorité du peuple. »

Grimguth avait été un drôle de personnage. Les parents de Ven disaient toujours de lui qu’il avait été innovant, ambitieux mais qu’il s’était laissé enivré par le pouvoir au point d’en perdre la tête. Il avait alors fait du havre de paix qu’était l’île une dictature féroce où il n’y faisait pas bon vivre. Heureusement pour les ridiens, plus personne n’a entendu parler de lui depuis deux siècles.

Mais ce n’était toujours pas ces informations que Ven cherchait. Il tournait les pages du livre dans une frénésie sourde, ne lisant que quelques mots, essayant de se souvenir de l’endroit où il avait bien pu voir le nom de Rye. Mais s’il l’avait lu plusieurs fois, s’il se souvenait de l’histoire et du fonctionnement des ridiens, il ne se souvenait plus de ce nom et de ce à quoi il correspondait.

« La seule façon de reconnaître un Ridien est quand celui-ci laisse apparaître son cercle de lumière. Le cercle de lumière est un petit anneau de lumière colorée autour de l'iris. »

Cette phrase le fit réfléchir. Maintenant qu’il connaissait la raison pour laquelle Rye ne voulait pas qu’on le touche – pour éviter à son cercle de lumière de se dévoiler en prenant de l’énergie –, il eut la réflexion qu’il savait très bien cacher le sien. Même s’il portait toujours des lentilles, il avait appris à le camoufler. Alors pourquoi ce n’était pas le cas de Rye ? Pourquoi ses parents ne lui avaient pas appris à le camoufler ?

Frustré, Ven referma le livre dans un soupir. Il le rejeta plus loin avant de s’effondrer dans son lit. Son esprit allait dans tous les sens. Ce nom qu’il n’avait pas retrouvé, le cercle de lumière de Rye… Pourquoi ? Qu’est-ce qui cloche dans tout ça ? Il n’en avait pas la moindre idée et ça le frustrait tant et si bien qu’il abandonna l’idée de trouver des réponses aujourd’hui.

Quant à Rye, il avait passé quelques temps penché sur son carnet à écrire, en réfléchissant à chaque mot qu’il inscrivait sur le papier. Cela lui prit donc du temps pour bien expliquer tout ce qu’il désirait expliquer dans le seul but de bien se faire comprendre, et encore, il n’était pas certain que tout serait parfait. Après ça, il travailla sur ses cours, une fin d’après-midi banale pour lui. Il ne fit rien d’exceptionnel si ce n’était de penser à Ven et au comportement qu’il a eu envers lui. Il n’avait pas été agréable sur la fin… Alors, il se tortura mentalement, se lyncha même un peu, trouvant qu’il mériterait certainement que Ven ne lui adresse plus la parole.

Le lendemain, Rye était angoissé. Il avait un peu peur de retourner au lycée et de croiser le regard froid et sec de Ven. Cela dit, tout ce qu’il trouva en son regard fut une peine certaine mêlée à un désarroi. Mais même si ce n’était pas le regard que Rye attendait de sa part, il fut grandement déstabilisé et se posa plein de questions. Pourquoi y avait-il de la peine dans son regard ? Pourquoi Rye avait ressenti du désarroi ? Que se passait-il avec Ven ? Ainsi, il se tortura l’esprit toute la matinée avec ces questionnements auxquels il n’aurait probablement jamais les réponses. Il put à peine se concentrer sur ses cours.

Jusqu’à l’heure du déjeuner, du moins. Il venait de s’installer seul à une table, comme à son habitude. Ça ne l’avait jamais dérangé de manger seul, d’autant plus que, de toute façon, il n’avait pas le choix. Les autres ne lui laissaient pas le choix et même si le harcèlement physique s’était arrêté, ils l’évitaient tous comme la peste.

Tous, sauf un. Ven vint s’installer face à lui, comme si tout était normal. Rye releva son regard surpris sur la veste de Ven, veste à l’effigie de l’équipe de football du lycée. Il aurait dû être avec l’équipe, justement. Mais cette fois-ci, il en avait visiblement décidé autrement et Rye mit quelques secondes à réagir, le temps de le regarder manger tranquillement en face de lui.

— Ven… Tu ne devrais pas…
— Pourquoi ?


Rye tourna son regard craintif vers le groupe qui les regardait tous les deux. Il avait peur des représailles et Ven le comprit très vite.

— Je ne leur appartiens pas, je peux encore décider avec qui j’ai envie de manger.
— Mais… Pourquoi tu veux manger avec moi ?


Ven cessa ses mouvements et fixa Rye avec insistance.

— Bah… On mange avec ses amis, non ?
— Oui, mais tu en as des plus populaires. Je sais pas si traîner avec moi en public t’apportera quoi que ce soit de bon…
— Rye. Tais-toi un peu. Tu dis trop de conneries, là.
— Mais non. Tu sais bien la réputation que j’ai.
— Et alors ?


Rye se mordit la lèvre et se mit à jouer avec sa nourriture nerveusement. Il haussa les épaules, gêné.

— Ben alors j’ai pas envie que tu te retrouves tout seul, isolé à cause de moi.

Un soupir se fit entendre de la part de Ven.

— Si je me retrouve tout seul et isolé, ce sera à cause des autres. Pas à cause de toi. Et si tu savais à quel point j’en aurais rien à foutre, je veux pas d’hypocrites dans ma vie.

Rye ne dit plus rien. Ven était bien trop têtu pour qu’il puisse le convaincre aisément de s’asseoir ailleurs pour son propre bien. Et puis, il ne mangeait pas seul et le fait que Ven soit avec lui le rassurait et lui procurait un bien fou. Il essayait tant bien que mal de cacher son sourire mais il était persuadé que Ven l’avait bien vu. Parce que lui aussi, il souriait. Complice, comme s’il comprenait son ressenti.

Les deux amis restèrent silencieux pendant tout le repas, mais ce silence n’était pas lourd, au contraire. Il était agréable, appréciable. Mais même si le silence régnait entre eux pendant le repas, ils s’échangèrent tout de même des regards amicaux accompagnés de quelques sourires. Puis, s’ils quittèrent le réfectoire ensemble, ils partirent ensuite chacun de leur côté.
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